La Cache – Christophe Boltanski

« La Cache » du titre se situe dans la résidence de la famille paternelle de Christophe Boltanski, une sorte d’hôtel particulier « rue-de-Grenelle », au centre de ce livre : c’est un espace réduit où le grand-père de Christophe se cacha durant deux ans pour échapper à la déportation en tant que Juif.

A travers un parcours dans cette demeure, l’auteur nous dépeint une famille pour le moins atypique formée autour de sa grand-mère atteinte par deux blessures- le lourd handicap que lui a laissé la polio, et son abandon par des parents qui l’ont confiée (vendue?) à une marraine fortunée sans enfant- et de son grand-père, médecin victime de l’antisémitisme, dont la famille et l’appartement seront le seul refuge.

Il y a une angoisse de l’extérieur, des origines floues et des identités louvoyantes derrière les nombreux pseudonymes-écrans, et un très fort sentiment d’enfermement dans ce livre, puisque la famille vit dans une sorte de cocon protecteur, avec ses enfants déscolarisés, ses membres collés les uns aux autres dans l’appartement, dans la voiture dans laquelle ils passent leurs vacances, ou durant leurs sorties.

Lire que le fils aîné (l’oncle de Christophe) dort, comme son neveu, sur un matelas au pied du lit de ses parents dans les années 60, donc à plus de trente ans, m’a rendue perplexe … et paradoxalement, cette atmosphère à première vue étouffante (et qui l’a peut-être été pour la vie privée de certains des enfants du couple) est un espace de liberté, joyeux et atypique, pour le petit Christophe, mais aussi de stimulation et de créativité : la mère est écrivain, deux des fils, Jean-Elie et Luc (père de Christophe) sont des intellectuels aux nombreuses publications, le troisième est Christian Boltanski, l’artiste mondialement connu.

Une saga familiale parfois perturbante, mais aussi extrêmement romanesque, avec des personnages hauts en couleur, des mystères, et également la confrontation, parfois brutale, avec l’Histoire du XXe siècle- émigration, naturalisation, les deux Guerres Mondiales, la guerre d’Algérie, Mai 68… à découvrir !

Publié chez Stock en 2015, en poche chez Folio, 344 pages. 

7 commentaires sur “La Cache – Christophe Boltanski

  1. J’ai adoré ce livre, la famille Boltanski c’est tout un univers, et l’auteur sait nous restituer le récit épique de ces aïeux. Du coup j’ai découvert le travail plastique de Christian Boltanski, l’oncle de l’auteur (si j’ai bon souvenir…). La Shoah a marqué cette famille et les petits enfants se doivent de restituer cette épisode qui défie l’imagination et qui a pourtant bel et bien été vécu par des familles. Je vais découvrir son dernier livre « Les vies de Jacob » avec impatience .

    1. oui, c’est bien son oncle! je connais très peu l’oeuvre de Christian Boltanski, mais après ce livre, j’ai bien envie de la découvrir !
      je lirai également « Les Vies de Jacob »…

  2. J’ai lu La Cache, il y a peu et j’ai la même analyse que toi sur ce livre. La famille est devenue une extension de la cache, à la fois prison et cocon et finalement le grand-père de Christophe Boltanski n’en est jamais sorti. Ce n’est peut-être pas un hasard s’ils ont été si nombreux à avoir des métiers artistiques ou tournés vers l’extérieur : une façon de s’évader ?

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