L’Ombre Pâle – David Naïm

Premier roman de David Naïm, « L’Ombre Pâle » se déroule en partie à Versailles, clin d’œil qui n’a pas manqué de me plaire. Car non, il n’y a pas que des catholiques royalistes dans cette ville, il y a(vait) également Moïse, qui vient de décéder.

Son fils Simon et lui n’étaient pas proches. Comme le dit Simon dans ce livre qui n’oublie pas d’être drôle malgré un thème grave, « il a commencé à s’occuper de son père lorsqu’il est mort ». Il organise donc les obsèques de Moïse, et découvre que le talit dans lequel celui-ci doit être enterré est en fait un double talit, puisque les franges de deux châles sont entremêlés. Le fantôme de Moïse lui apparait dans ses rêves, lui demandant de reconstituer l’histoire de l’autre propriétaire, Clément, le père de Moïse et grand-père de Simon…

Ce récit nous plonge dans une période de deuil mais aussi d’introspection familiale, qui va profondément ébranler la vie de Simon. Cet homme se trouve à la croisée des chemins, que ce soit sur le plan professionnel comme personnel. Il règne un flou artistique sur les générations précédentes des hommes de sa famille : il ne sait quasiment rien de Clément, son grand-père, qui, comme Moïse après lui, est né en Tunisie et y était durant la Seconde Guerre Mondiale – l’occasion d’évoquer l’occupation allemande dans ce pays, ce qui est rarement fait en littérature, je me souviens seulement d’avoir lu le livre de Serge Moati « Villa Jasmin » à ce sujet. Clément a été un homme absent, physiquement, alors que Moïse était là sans être là…

Il y a toute une dimension psycho-généalogique dans ce livre, où il est difficile de se construire quand on ne sait pas vraiment d’où l’on vient. Le talit représente à la fois la tradition mais aussi le lien, le tissage comme dans « dor », ce mot cité dans le roman, qui veut dire « génération » en hébreu mais aussi « l’art de tisser les paniers », car les générations sont toujours tissées les unes aux autres.

Un beau livre, empreint d’une mélancolie non dénuée d’humour.

Publié en Août 2024 chez l’Antilope, 256 pages.

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