La Mémoire est une Chienne Indocile – Elliot Perlman

« La Mémoire est une Chienne Indocile » (quel titre qui claque! on est loin du « Balayeur de Rue » du titre original) d’Elliot Perlman est un roman qui est resté bien trop longtemps dans ma PAL, au vu de sa qualité…c’est un coup de cœur!

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Elliot Perlman
Dans ce roman, on suit de façon parallèle deux personnages principaux : Lamont Williams, un Afro-Américain de trente-huit ans, vient de sortir de prison. Il a trouvé un emploi au service entretien d’un hôpital, emploi qui, il l’espère, lui donnera les moyens de retrouver sa fille qu’il n’a pas revue depuis six ans. A l’hôpital, Lamont rencontre un patient âgé, Henryk Mandelbrot, Juif d’origine polonaise, qui va lui raconter dans les moindres détails sa vie pendant la Seconde Guerre Mondiale, du ghetto jusqu’à Auschwitz, où il était employé d’un Sonderkommando, c’est-à-dire préposé aux fours crématoires. Adam Zignelik est le fils d’un célèbre avocat du NAACP, qui s’est battu pour mettre fin à la ségrégation. Un peu écrasé par l’aura de ce père qui ne s’est pas beaucoup occupé de lui, Adam est en plein marasme: il n’a rien publié depuis des années, et cela va sans doute lui coûter sa titularisation à la chaire d’histoire de Columbia, bien qu’il soit très ami avec le directeur du département d’histoire, William McCray. Cela le pousse à mettre fin à sa relation de huit ans avec sa petite amie, car il ne se sent pas prêt dans ces conditions à avoir des enfants, ce qu’elle désire ardemment. Un vieil ami de son père, Charles, qui est aussi le père de William McCray, lui suggère alors de s’intéresser aux soldats noirs qui ont libéré les camps de concentration, car leur implication a toujours été passée sous silence par l’Armée et par l’Histoire. Au cours de ses recherches, Adam tombe par hasard sur les premiers enregistrements de témoignages de rescapés des camps de concentration, effectués juste après la fin de la Guerre par un psychologue, Henry Border.
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En voilà un coup de cœur! Elliot Perlman s’empare dans ce livre de deux thèmes porteurs, le racisme et l’antisémitisme et les mêle brillamment dans une fresque qui réussit à être à la fois romanesque et porteuse d’un message fort. L’auteur nous emmène en autres en Pologne dans les années 30, à Auschwitz, à Little Rock en 1957, en Australie, ou dans le New York contemporain, et l’on suit une multitude de personnages qui tous sont liés d’une façon ou d’une autre. Elliot Perlman réussit à merveille à imbriquer plusieurs histoires, et à faire vivre des dizaines de personnages, et notamment à créer des scènes mémorables, qui auraient même pu exister de façon autonome, comme des nouvelles : la scène d’ouverture, dans le bus, est absolument incroyable, tout comme le premier jour d’une adolescente noire allant dans un lycée de Little Rock, le récit de Lamont enfant amenant une petite figurine chez un copain, ou cette scène dans un restaurant de soupe de boulettes avec une phrase de conclusion mémorable.
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« La Mémoire est une Chienne Indocile » est certes assez dense, mais c’est un roman tellement passionnant que les pages se lisent à toute allure. J’ai aimé que rien ne soit gratuit dans un livre, que toutes les scènes, tous les personnages aient une signification, et que tout se recoupe, un peu comme dans « Une Prière pour Owen » de John Irving. Bien sûr, le racisme et l’antisémitisme, à travers la Shoah, sont les thèmes principaux du roman, mais sous-jacent c’est la question de la mémoire et de la transmission qui se posent, que ce soit la transmission parent-enfant ou la transmission historique et officielle.
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Vous l’aurez compris, « La Mémoire est une Chienne Indocile » d’Elliot Perlman est un roman aussi beau et bien écrit qu’il est intéressant et intelligent. A découvrir d’urgence!
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Publié le 10 Janvier 2013 chez Robert Laffont, traduit par Johan-Frederik Hel-Guedj, 585 pages, en poche chez 10/18

16 commentaires sur “La Mémoire est une Chienne Indocile – Elliot Perlman

    1. Après le coup de cœur de HOP SUS LA COUETTE de Marie Claude et le tien ,je l’ai mis en haut de ma PAL et je viens de tourner la dernière page…Juste un qualificatif : MAGISTRAL !
      Merci pour cette découverte à côté de laquelle je serai certainement passée ce fut un bonheur de lecture en même temps qu’une claque !Il va falloir que je fasse mon article sur mon blog pour mettre en avant ce magnifique livre …pas simple ! MYMY de http://cousineslectures.canalblog.com/

  1. @Tant qu'il y aura des livres : ah ça me fait plaisir! 🙂
    @Marie-Claude : on n'en a pas assez parlé et c'est bien dommage
    @MYMY: super! ce roman mérite vraiment d'être lu 🙂

  2. Vos trouvailles, -vos "pépites" -, et vos commentaires sont enthousiasmants !
    C'est ma PAL qui grimpe vertigineusement car je suis incapable de suivre votre rythme de lecture…Bravo à vous.

  3. C'est vrai que j'en avais entendu parler (mais un tout petit peu) et que le résumé et la présentation avaient attisé ma curiosité. En plus il est sorti en poche : super!! Je le note!
    Il n'a pas l'air 'être "évident" mais les thèmes m'intéressent beaucoup.

  4. Le pitch comme ça ne me tente parce qu'il mêle peut-être trop de choses, mais en même temps ce que tu en dis donne envie de passer outre cet à priori, ce sont globalement des thèmes qui m'intéressent donc je le lirai peut-être.

    C'est sympa cette nouvelle déco en bois, j'aime beaucoup, par contre pour lire les commentaires, gris sur gris c'est un peu compliqué.

  5. @ Tiphanie : oui c'est très foisonnant mais c'est très bien maitrisé, et c'est vraiment un roman qui vaut le coup d'être lu.
    Merci de m'avoir signalé le problème des commentaires, j'ai bien galéré, mais c'est résolu!

    @Jérôme : je suis sûre qu'il va te plaire!

    @ Léa : mais qui n'a pas aimé ce roman?? 🙂

    @Laeti : il est très accessible et vraiment passionnant!

    @Anonyme : merci pour ce gentil message, vous connaissant je suis sûre qu'il vous plairait!

    @Noukette : oh tu vas adorer!!!

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