Le Coeur de l’Angleterre – Jonathan Coe

J’ai été ravie quand j’ai su que Jonathan Coe retrouvait la fameuse famille Trotter, que j’avais tant aimée dans « Bienvenue au Club » et sa suite « Le Cercle Fermé » pour un troisième tome consacré au Brexit : « Le Coeur de l’Angleterre ». Jonathan Coe est un auteur qui a beaucoup compté pour moi, depuis le premier livre que j’ai lu de lui : « Testament à l’Anglaise » (et dont il m’a dédicacé un poche un peu jauni quand j’ai eu la chance de le rencontrer grâce à Gallimard en Mai dernier…)

On retrouve donc la famille au sens élargi – Benjamin, sa sœur Lois, et leurs anciens camarades d’école – désormais âgée d’une cinquantaine, voire d’une soixantaine d’années. Il est d’ailleurs dommage que ce troisième volume ne commence pas par une rapide présentation des protagonistes et un rappel des deux premiers tomes, car, les ayant lus à leur sortie en France, soit en 2002 et 2006, je n’avais plus forcément en tête tous les personnages…

J’ai lu ce livre avec un a priori positif et un gros capital de sympathie, et j’ai retrouvé avec plaisir la plume très agréable de Jonathan Coe, et son talent pour faire vivre une multitude de personnages. Malgré cela, mon sentiment est quand même mitigé. Le Brexit est bien sûr un événement incontournable de ces dernières années (même si je trouve que c’est une histoire qui dure depuis bien trop longtemps maintenant…) et c’est un sujet à adresser en littérature si l’on est un auteur anglais bien ancré dans son temps. Je comprends donc tout à fait pourquoi Jonathan Coe a souhaité s’en emparer, et aussi pourquoi il s’est servi de personnages familiers pour écrire sur ce thème.

Même si j’ai lu « Le Coeur de l’Angleterre » rapidement et avec intérêt, j’ai trouvé l’ensemble un peu poussif. Peut-être est-ce parce que les protagonistes ont vieilli plus vite que moi? J’étais ado quand ils étaient ados dans « Bienvenue au Club », jeune adulte quand ils étaient adultes dans « Le Cercle Fermé ». J’ai eu du mal à m’intéresser aux préoccupations de Ben et Doug, et c’est de Sophie, la fille de Loïs et nièce de Ben, dont je me suis finalement sentie la plus proche. Alors certes, il y a quelques scènes très réussies, notamment la fameuse scène de sexe dans l’armoire que j’ai trouvée très drôle, mais j’ai trouvé que Jonathan Coe était trop dans la démonstration – regardez comment et pourquoi on en est arrivé là – et que le roman manquait d’intrigue,  de souffle littéraire, et de subtilité…car il est parfois à la limite de la caricature : on y trouve l’adepte de la théorie du grand remplacement, une Social Justice Warrior (Coriandre), une vieille dame raciste (la mère d’Ian)…

Comme il y a beaucoup de personnages, on ne s’ennuie jamais vraiment, mais c’est finalement le rappel historique et politique de ces dix dernières années en Angleterre qui m’a intéressée, aux dépends de l’aspect littéraire et romanesque qui n’est pour moi pas assez développé.

Une lecture en demi-teinte, qui me donne envie de me replonger dans les deux premiers tomes pour y retrouver le plaisir qu’ils m’avaient procuré…

Publié en Août 2019 chez Gallimard, traduit par Josée Kamoun, 560 pages.

16e lecture de la Rentrée Littéraire de Septembre 2019.

Merci à Gallimard pour cette lecture et pour m’avoir permis de rencontrer Jonathan Coe!

10 commentaires sur “Le Coeur de l’Angleterre – Jonathan Coe

  1. Merci Eva pour ton analyse précise et affûtée… Je me contenterai donc sûrement de la scène de l’armoire pour cette fois 🙂 piochant ailleurs dans tes chroniques pour ma PAL (si si !)

  2. J’ai bien aimé me plonger dans ce roman qui m’a fait rire et que j’ai trouvé assez juste, mais surtout j’ai aimé lire/relire les deux premiers « tomes » qui étaient vraiment excellents ! 😄😄

  3. Je te trouve bien difficile, ma chère… 😉
    Je n’ai jamais trouvé que Jonathan Coe était dans la démonstration… (d’ailleurs, que démontre-t-il ?), bien au contraire, il n’est que dans l’auscultation des relations humaines, celle-là même dont on tire la substantifique moelle des bons romans, sans jamais prendre aucun parti et toujours un sourire ironique au coin des lèvres. Quant à la limite de la caricature… il suffit de passer la tête hors de chez soi pour se trouver face aux personnages qu’il décrit.
    Si on ne me livrait que des romans de cette facture, je serais aux anges !

    1. je sais que tu as beaucoup aimé ce livre. Mes attentes étaient certainement élevées car je lis Jonathan Coe depuis qu’il est publié en France, et c’est un auteur que j’apprécie beaucoup, donc oui, quand ça le concerne, je suis difficile et dans ce roman, je n’ai pas retrouvé le souffle et la saveur de ses précédents romans – j’ai trouvé que ça manquait d’intrigue, que les personnages n’étaient pas très attachants… bref, un rdv manqué ! (ça ne m’empêchera pas de lire le prochain)

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