Il n’y aura bientôt plus personne – Marie Vaislic

Des livres de rescapés de la Shoah il y en a beaucoup, et elle le dit elle-même, mais il faut lire « Il n’y aura bientôt plus personne » de Marie Vaislic, écrit en collaboration avec Marion Cocquet.

Marie Vaislic est née en 1930 à Toulouse, de parents juifs polonais, non religieux- elle ne savait d’ailleurs pas qu’elle était juive avant la guerre. La famille cachée à la campagne, Marie était parfois envoyée faire une course à Toulouse: lors d’une de ces missions, elle fut dénoncée par un voisin, arrêtée, puis déportée le 30 juillet 1944, d’abord à Ravensbrück puis surtout Bergen-Belsen, encore plus terrible.

C’est le témoignage d’une enfant, déportée absolument seule, à 14 ans, qui reviendra chez elle un an plus tard, mais en ayant vécu l’inimaginable.

Encore un peu naïve, elle va se retrouver confrontée brutalement à la mort (notamment celles de nourrissons), à la faim, à la noirceur de l’âme humaine, contre lesquelles elle va devoir se forger une carapace, une dureté, une méfiance, qui perdureront après la guerre. Il y a pourtant quelques traits de lumière, avec Mimi, qu’elle connaissait de vue à Toulouse et qui va la prendre sous son aile, ou encore cette femme qui va l’aider à se rincer les cheveux, un geste anodin mais qui la marquera assez, dans cet enfer, pour qu’elle la retrouve après-guerre pour l’inviter à son mariage.

Le récit trace le portrait d’une jeune fille qui a déjà son petit caractère, qui va se révéler débrouillarde, mature, intelligente – chanceuse aussi parfois – et que l’inconscience relative de la jeunesse a sans doute empêchée de sombrer.

Et puis c’est le retour en France, alors que personne n’a vraiment envie d’entendre les histoires des Juifs déportés, où Marie Vaislic est accueillie entre perplexité, soupçon, et déni, où ce qu’elle a vécu est minimisé, même par sa propre famille et son mari, pourtant gentils et aimants, en comparaison avec ce qui est arrivé aux Juifs polonais ou à ceux déportés à Auschwitz.

Un beau récit, très humain, sincère, réfléchi, et assez unique en son genre, à lire absolument.

Publié en Janvier 2024 chez Grasset, 144 pages.

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