Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas lu de roman graphique de Craig Thompson, depuis « Blankets », il y a vingt ans, ouvrage que j’avais adoré.
A l’occasion d’une blessure lors d’un voyage en Chine, Craig Thompson est soigné grâce à un onguent à base de ginseng. Cette anecdote lui rappelle sa jeunesse : sa petite ville de Marathon dans le Wisconsin était spécialisée dans la culture du ginseng et ses parents arrondissaient leurs fins de mois en travaillant dans les champs, suivis par leurs enfants, Craig, son frère Phil mais aussi sa sœur Sarah (occultée dans Blankets)
Les garçons gardent un très bon souvenir de ce petit boulot, pourtant dur et fatiguant, qui leur permettait d’acheter des comics, leur grande passion. Craig et Phil profitent du premier festival du ginseng de Marathon pour aller voir leurs parents et interviewer des acteurs locaux de cette culture …
Je ne connaissais pas du tout l’existence du ginseng américain et j’ai découvert avec plaisir, grâce à « Ginseng Roots », cet angle choisi par Craig Thompson pour nous ramener sur les terres de son enfance, ses racines. On y découvre un adulte apaisé dans sa relation avec ses parents, devenus plus bienveillants et ouverts d’esprit, mais aussi deux frères qui retrouvent leur complicité d’antan autour de ce projet.
C’est une véritable enquête que Craig Johnson nous livre : sur la production du ginseng, son économie, son exploitation, qu’elle soit locale (aux USA) ou en Asie puisqu’il n’hésite pas à se rendre en Corée ou en Chine, dans un contexte où lui-même lutte contre un grave problème de santé et s’intéresse aux médecines non-occidentales. Il nous parle aussi de l’agriculture aux Etats-Unis, des changements de paradigme, de la difficulté à trouver de la main d’œuvre, de l’immigration … avec des pages poignantes sur des membres de la communauté Hmong.
C’est un ouvrage riche, dense, foisonnant, une somme de travail extrêmement bien mise en valeur par les dessins- à la fois très sophistiqués et très accessibles, tout en rouge, gris, noir, blanc.
A la fois très intéressant et très touchant.
Publié en Septembre 2024 chez Casterman, traduit par Frédéric Vivien, Isabelle Licari-Guillaume, Laëtitia Vivien, 448 pages.