J’avais tellement aimé « La Maison des Absents » de Tana French, lu dans le cadre du Prix ELLE en 2013, que je m’étais promis de découvrir d’autres ouvrages de la même auteur. Je me suis donc procuré « Les Lieux Infidèles », son roman précédent, qui lui aussi se déroule en Irlande.
En Décembre 1983, Franck Mackey devait quitter Dublin avec sa petite amie Rosie, en cachette de leurs parents, afin de s’installer en Angleterre. Seulement Rosie n’est jamais venue au rendez-vous, et a disparu, laissant simplement derrière elle une lettre de rupture. Vingt-deux ans plus tard, Franck, qui a coupé les ponts avec sa famille, reçoit un coup de fil de sa sœur qui lui annonce que la valise de Rosie a été retrouvée dans une maison désaffectée, non loin de leur lieu de rendez-vous…Franck doit alors revenir dans le quartier de sa jeunesse, et parmi les siens, pour découvrir la vérité : Rosie l’a-t-elle bien quitté ce soir-là ou n’est-elle en fait jamais partie?
« La Maison des Absents » m’avait tellement frappée de par l’originalité de son intrigue, que j’avais forcément placé la barre très haut pour cette deuxième lecture d’un livre de Tana French. La déception n’en a donc été que plus mordante. Rien à dire sur l’écriture, le récit est fluide, se lit très bien, et les personnages et les atmosphères sont très bien campés. Je n’ai eu aucun mal à me représenter Franck, son ex-femme Olivia, leur fille Holly, et toute la famille de Franck, les parents et les frères et sœurs, issus du prolétariat dublinois. Tana French rend très bien dans ce roman les tensions familiales, les rancœurs du passé tout comme les souvenirs émus de l’enfance et de l’adolescence, que ce soit les balades entre amis ou les premières rencontres entre Rosie et Franck. Tout comme elle décrivait à merveille les espoirs balayés des yuppies dublinois frappés par la crise et croulant sous les dettes dans les années 2000, Tana French nous plonge très facilement dans un foyer pauvre d’un quartier populaire de Dublin, où les enfants essayent comme ils peuvent de s’en sortir, dans la promiscuité et les difficultés d’argent, face à un père alcoolique et bagarreur qui brûle sa paye au bar et fait honte à sa progéniture et une mère abîmée par la vie et les déceptions. J’ai aimé l’opposition entre la vision que Franck a des Mackey, qu’il voit comme des gens frustes et vulgaires alors que sa fille, même si elle est étonnée de leur façon de vivre, retient surtout l’unité familiale et le plaisir des repas en famille.
Mais au niveau de l’intrigue en elle-même, rien d’original. Franck est un loup solitaire, encore attiré par son ex-femme, et qui, comme par hasard, reçoit un coup de fil qui va tout changer le week-end où il était censé garder sa fille pour se rattraper du peu de temps qu’il lui concerne habituellement. J’ai lu exactement la même chose il y a une dizaine de jours dans « Intérieur Nuit »…vous allez me dire que « Les Lieux Infidèles » a été publié avant le roman de Marisha Pessl, mais « Intérieur Nuit » a au moins le mérite d’être très original, et vraiment marquant…Je me suis très vite doutée de la fin, et rien ne m’a vraiment surprise dans ce livre, qui est agréable à lire, mais dont les pages se tournent sans grande curiosité ou impatience. « Les Lieux Infidèles » m’ont à un moment fait penser à un roman de Dennis Lehane dont je ne vous donnerai pas le titre, pour ne pas vous dévoiler le dénouement, et effectivement, la raison de la disparition de Rosie était tout à fait similaire, j’ai donc eu une forte impression de déjà-lu.
« Les Lieux Infidèles » est un bon roman d’ambiance, mais il m’a déçue au niveau policier. J’en attendais beaucoup plus vu le talent de Tana French…Cela reste une lecture agréable, qui ne me détourne pas de l’auteur, dont je lirai sans doute le nouveau roman « La Cour des Secrets », mais à ceux qui veulent la découvrir, je conseillerais plutôt « La Maison des Absents ».Publié le 26 Janvier 2011 chez Calmann-Lévy, traduit par François Thibaux , 440 pages, en poche chez Pocket.
je ne la connaissais que de nom – vu que je connais Intérieur Nuit et Dennis Lehane, je passe mon tour par contre je vais essayer de lire son précédent dont tu dis le plus grand bien dans ton autre billet
@ Electra: oui l'autre est top, aussi bien au niveau de l'intrigue qu'au niveau du contexte…
Comme toi, ce roman m'a déçue, du coup je n'en ai pas lu d'autres.
@Valérie : heureusement que j'avais lu la Maison des Absents avant car sinon je ne pense pas que j'en aurais lu d'autres