Abraham et Fils – Martin Winckler

J’avais un peu perdu de vu Martin Winckler depuis la parution de « La Maladie de Sachs » mais le passage de l’écrivain-médecin à La Grande Librairie m’a donné envie de me plonger dans son dernier roman « Abraham et Fils ».

En 1964, le jeune Franz Farkas s’installe avec son père Abraham dans une petite ville du Loiret, où celui-ci reprend un cabinet médical. Le père et le fils arrivent d’Algérie, après un détour aux Etats-Unis. La mère, quant à elle, est morte dans un mystérieux accident dans lequel Franz a été blessé : le petit garçon ne se rappelle de rien, et son père n’en parle jamais. Franz et Abraham s’intègrent dans la petite ville, et partagent bientôt la grande maison qu’ils habitent avec Claire, la jeune femme qui est devenue l’assistante d’Abraham et sa fille adolescente, Luciane. Un jour, ils découvrent que leur maison a servi de cachette à deux familles juives avant qu’elles aient été dénoncées et déportées…

Voici un roman qui m’a fait une impression mitigée. « Abraham et Fils » est un pavé, que j’ai mis beaucoup de temps à lire, je n’arrivais pas à avancer dans le récit, et j’ai même lu d’autres livres en parallèle. En effet, j’ai trouvé le début du roman sympathique et agréable à lire, mais aussi trop long : il y a des pages et des pages sur Franz qui va à l’école, Franz qui se fait des amis et des ennemis, Franz qui découvre la lecture… Certes, le petit garçon est attachant, mais je me suis vite lassée de ce côté « Les allumettes suédoises dans les années 60 » qui dure quand même plus d’une centaine de pages. J’ai senti que Martin Winckler avait quelques points communs avec le personnage de Franz : sensiblement le même âge en 1964, lui aussi rapatrié d’Algérie, lui aussi vivant dans le Loiret, lui aussi fils de médecin, lui aussi Juif… et qu’il nourrissait l’environnement de Franz, sa découverte des émissions de télévision, des illustrés et des romans, de ses propres souvenirs d’enfance, et que cela lui plaisait de développer cette partie du roman, mais il a failli me perdre en route.

« Abraham et Fils » a vraiment commencé à me plaire lorsque l’intrigue a décollé. Enfin j’en savais plus sur « l’accident » qui avait coûté la vie à la mère de Franz, enfin Abraham parlait de sa famille à l’histoire mouvementée, enfin la période de la Seconde Guerre Mondiale était évoquée…Et là j’ai dévoré le roman. Il faut dire que les personnages sont attachants, et que l’on se sent bien dans « Abraham et Fils ». Il y règne une vraie bienveillance, portée par le personnage d’Abraham, un homme tourmenté mais réfléchi, qui a foi en l’être humain. Mais comme le roman est raconté à travers le prisme du personnage de Franz, un garçon de dix ans, il y a un côté enfantin dans « Abraham et Fils » – même si des sujets graves ou « adultes » sont abordés (relation polyamoureuse, attentats, dénonciations, déportations…), il y a un côté Club des 5 ou Clan des 7 avec journal intime écrit au jus de citron, passage secret et mystère et boule de gomme. Il n’y a d’ailleurs par la réponse à toutes les interrogations, et certains personnages et épisodes sont juste évoqués sans être développés – par exemple le séjour aux Etats-Unis et la fameuse Julie, mais il y aura une suite à « Abraham et Fils », « Les histoires de Franz » où ces questions seront peut-être adressées. »Abraham et Fils » de Martin Winckler est un roman qui fait bien cent pages de trop à mon goût, et que j’ai failli abandonner, mais j’ai bien fait de persévérer car c’est un livre très plaisant et bienveillant, même si je pense que je l’aurais plus apprécié si je l’avais lu adolescente. Il n’empêche que je retrouverai Franz avec plaisir pour la suite de ses aventures…

Publié le 11 février 2016 chez P.O.L, 576 pages.

27e participation au Challenge Rentrée Hiver 2016 organisé par Laure de Micmelo.

6 commentaires sur “Abraham et Fils – Martin Winckler

  1. Oui, moi aussi j'ai perdu Winckler de vue, pour moi c'était apres le Chœur des Femmes , qui m'avait pourtant plu , malgré -ou grâce?- à son sujet quelque peu scabreux.
    Winckler, c'est un peu comme un cousin qu'on a l'impression de pouvoir retrouver quand on voudra, mais à qui on en veut un tout petit peu quand même d'être parti s'établir au Canada 😉

  2. Tu ne précises pas le nombre de pages, je l'avais vu à LGL et il avait de parler de la bienveillance. Dommage pour les cent pages de trop ! Par contre, je te félicite de ne pas avoir abandonner et je ne sais pas comment tu as fait pour lire d'autres livres en parallèle ! moi quand je lâche c'est fini pour de bon.

  3. @ Mior : pas si scabreux que ça la gynécologie, Mior 😀

    @ Noukette : son plus connu est "La Maladie de Sachs"

    @ Electra : le nombre de pages est marqué en tout petit à la fin de l'article (576) – les livres lus en parallèle étaient soit de courts romans soit des romans graphiques, donc rien de trop absorbant qui me coupe complètement de ce roman

    @ Souguite : il y a certainement des éléments qui devraient vous parler…

    @ Edyta : il est très inspiré du quotidien de gynécologue de l'auteur…

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