J’ai déjà lu deux livres de Maggie O’Farrell en 2016 – » En cas de forte chaleur » et « Cette main qui a pris la mienne » – et j’avais entendu beaucoup de bien de « L’étrange disparition d’Esme Lennox », recommandé chaudement par Electra ou par ma mère…C’est donc un roman que j’avais très envie de lire et pour lequel j’avais de grandes attentes…peut-être un peu trop?
Iris, la trentaine, reçoit un jour un coup de fil qui lui annonce qu’elle a une grande-tante, Euphemia dite Esme, et que celle-ci vit dans un asile psychiatrique qui va bientôt fermer. La jeune femme tombe des nues : elle qui croyait que sa grand-mère Kitty était fille unique découvre que celle-ci a en fait une sœur, enfermée dans un asile depuis…60 ans. Pourquoi s’est-elle retrouvée internée, et ceci pendant soixante ans? Et pourquoi la famille a-t-elle effacé son existence?
J’ai eu du mal à rentrer dans le roman, car l’histoire d’Iris est entrecoupée de bribes de pensées d’Esme et de Kitty, aujourd’hui atteinte de la maladie d’Alzheimer. Toutes deux n’ayant pas forcément les idées claires, ces passages sont souvent nébuleux, embrouillés, avec des propos sautant du coq à l’âne. Pourtant se dessine en filigrane l’histoire d’une famille en Inde, qui rentre en Ecosse après qu’un drame l’a frappée. Les deux filles de la famille grandissent, et Esme , d’enfant bizarre devient une jeune fille décalée et excentrique.
Si les fragments de souvenirs des deux soeurs ont perturbé ma lecture – surtout au début, car au fur et à mesure cela devient plus fluide – je me suis attachée à Iris, cette jeune femme solitaire, embourbée dans une relation avec un homme marié, très proche d’Alex son « frère » – en fait le fils de l’ex-compagnon de sa mère – et qui découvre brutalement que l’histoire de sa famille est un vaste mensonge. D’abord un peu effrayée par Esme, qu’elle imagine peut-être dangereuse (quel genre de personne passe soixante ans dans un asile?), elle apprend à connaître la vieille dame et à la réintégrer dans sa vie.
Maggie O’Farrell est une très bonne conteuse. Même si je n’ai pas accroché à son choix de narration, j’ai dévoré « L’Etrange Disparition d’Esme Lennox ». Le récit est prenant, les personnages sont attachants, les allers-retours entre le présent et le passé, mais avec des souvenirs embrouillés, permettent de reconstituer cette histoire, mais lentement, par bribes, en s’appuyant sur de petits détails. On voit clairement où veut en venir l’auteure, qui met en avant dans ce livre les internements abusifs subis par des jeunes femmes parce que leur attitude ou ce qu’elles avaient vécu dérangeait la société ou leur famille. La famille, un sujet de prédilection pour Maggie O’Farrell, qui semble aimer écrire des intrigues sur fond de lourds secrets.
Mais justement, j’ai trouvé ce livre assez prévisible. Alors, non, je n’avais pas deviné la toute fin, mais j’ai vu arriver le secret de famille à des kilomètres, ainsi que l’évolution de la vie sentimentale d’Iris. J’ai trouvé également que la vie dans l’asile était traitée de façon superficielle alors qu’Esme y a quand même passé 60 ans ! Et d’ailleurs, il m’a semblé peu crédible qu’Esme apparaisse si peu affectée après avoir passé quasiment toute sa vie enfermée, dans des conditions dures et sordides. Elle est en excellente forme physique et gambade joyeusement, elle s’adapte facilement à la vie extérieure alors qu’elle n’est jamais sortie de l’asile depuis les années 30 et qu’absolument tout a changé depuis…
« L’étrange disparition d’Esme Lennox » est un livre addictif, qui se dévore malgré une construction certes originale et intéressante mais aussi un peu brouillonne, mais que j’ai trouvé un peu trop prévisible et parfois superficiel pour l’apprécier complètement. Peut-être l’aurais-je plus apprécié si c’était ma première lecture de Maggie O’Farrell mais le fait d’en avoir lu deux autres exploitant déjà le sujet des secrets de famille a sans doute diminué mon plaisir de lecture. Un roman agréable mais pas inoubliable, en tout cas pas du tout le coup de coeur auquel je m’attendais.
Publié en 2008 chez Belfond, traduit par Michèle Valencia, 240 pages. En poche chez 10/18.
Dommage, vraiment. Je tardais à découvrir cette auteure. Je vais tarder encore!
elle a une plume vraiment très fluide et plaisante…
J’avais eu un coup de coeur mais en même temps c’était le premier que j’avais lu d’elle, ça a peut-être joué.
je pense en effet que si je l’avais lu en premier (et pas « En cas de forte chaleur ») je l’aurais beaucoup plus apprécié…là c’est secret de famille après secret de famille et je commence à saturer un peu…
J’avais beaucoup aimé ce livre.
j’ai eu en effet énormément de retours positifs sur ce livre…
J’ai adoré ce roman mais curieusement je n’en ai jamais parlé sur le blog !
quand je vois tous les livres que tu chroniques sur le blog, je suis époustouflée de découvrir qu’il y en a en fait plein dont tu ne parles pas !
Coup de coeur pour moi, l’auteure m’a parfois déçue aussi.
J’ai lu les 3 derniers traduits en français, il me reste encore ses 3 premiers à lire (et celui qui a été publié en anglais cette année)
J’ai eu le même bémol, elle me paraissait bien en forme après 60 ans en asile, et vite dans le monde actuel.
surtout que le livre est censé dénoncer l’internement abusif…là on a l’impression qu’elle sort d’une cure de jouvence…
Pas très emballants tes bémols.
disons qu’il y a du bon et du moins bon dans ce roman…
Moi aussi j’avais lu « En cas de forte chaleur » et « Cette vie qui a pris la mienne », que j’avais trouvés » pas mal » …En revanche, j’ai dévoré « L’ étrange disparition… » (comme toi, apparemment ) , j’ai aimé et, dans ce cas, je ne vois que le plaisir de la lecture, je ne me pose aucune question sur la vraisemblance, la construction… ( J’ai eu la même attitude avec « La table des enfants » )
En fait, je n’ai pas trouvé le récit embrouillé…Simplement, on découvre peu à peu l’histoire, le puzzle prend forme. Je me suis attachée aux personnages féminins, j’ai éprouvé moi aussi l’indignation sous-jacente de l’auteur, j’ai pensé à Camille Claudel que sa famille jeta dans un asile les 30 dernières années de sa vie…Vraiment, ce roman me laisse un bon souvenir !
c’est vrai que l’auteure a une plume très agréable et addictive et j’avoue que j’ai lu ce livre très vite j’avais hâte de le finir…
Ce qui m’a gênée, c’est qu’il y a une dénonciation de l’internement abusif et des conditions d’internement, or quand on voit l’état d’Esme quand elle sort et sa capacité d’adaptation à un monde qui a radicalement changé pendant son enfermement (et elle dit bien qu’elle n’est jamais sortie de l’asile en 60 ans) la dénonciation a beaucoup moins de poids
J’ai lu les deux mêmes que toi… Celui-ci est dans ma liste à lire mais tu me refroidis un peu.
il est néanmoins très agréable à lire
Bonsoir Eva, merci d’avoir évoqué ce roman que j’ai lu par hasard quand il a paru. J’ai été une des premières à le chroniquer sur mon blog. http://dasola.canalblog.com/archives/2008/05/17/9157378.html Bonne soirée.
oui j’arrive quasiment 10 ans après la bataille !
Une auteure que j’aime bien, elle parvient souvent à me toucher. Mon préféré reste un de ses plus anciens, celui par lequel je l’ai connue « Quand tu es parti ». Il m’avait bouleversée à l’époque… et depuis, je la suis avec des résultats inégaux mais jamais inintéressants.
C’est en tout cas une auteure que je vais continuer à lire – comme tu le dis très bien, même si ses romans sont inégaux il y a toujours quelque chose d’intéressant, de touchant, d’addictif…
Je l’ai lu mais j’en garde un souvenir très diffus. Il ne m’a pas marquée !
Mon souvenir commence à se dissiper également…
Je n’ai pas lu le livre dont vous parlez mais j’ai lu « un peu de bleu dans le ciel » qui m’a conduite au premier roman de Maggie O’Farrel « Quand tu es parti ». J’ai beaucoup apprécié ce dernier. Il est construit avec des flashs sur l’héroine, sa mère et sa grand mère. C’est un beau roman sur l’amour qui vous cerne ou vous perd, qui vous éblouit, qui est comme votre oxygène. S’il est là, vous vivez fort. S’il vient à manquer, c’est l’étouffement.
Je ne sais quels livres vous avez déjà examinés. Je ne peux m’empêcher de vous recommander, à la volée, le roman d’Esi Edugyan « 3 minutes et 33 secondes ». Du beau, de l’émotion, de la joie, de l’étonnement. Juste le temps d’un set de jazz qui vous accompagnera sans fin.