S’il y a bien une collection qui me fait lire des recueils de nouvelles, c’est Terres d’Amérique et ses choix éditoriaux de très bonne qualité. « Nous aurions pu être des princes » a été écrit par un jeune auteur américain d’origine cambodgienne, Anthony Veasna So, décédé accidentellement en 2020 à l’âge de 28 ans.
Le recueil commence très fort avec une histoire qui, comme dans un tableau de Hopper, se déroule dans un restaurant de donuts ouvert de nuit et tenu par une femme et ses deux petites filles. La plupart des nouvelles se déroulent à Stockton, ville de Californie où se sont installés de nombreux Cambodgiens ayant fui la dictature de Pol Pot. Il y a une vraie homogénéité dans ce recueil dont les protagonistes, à l’image de l’auteur, qui ne semble jamais loin des histoires qu’il raconte, sont des jeunes de la seconde génération, des Americano-Khmers qui oscillent entre les valeurs des Etats-Unis qui les ont vus naître et la culture ancestrale – nourriture, religion, poids des traditions, influence des personnes âgées de la communauté.
Certaines nouvelles sont complètement indépendantes, d’autres se répondent (comme « Maly Maly Maly » et « Somaly Serey, Serey Somaly ») ou font allusion, au détour d’une phrase, à des personnages rencontrés dans une autre histoire. Histoires de famille, amour, homosexualité, difficultés financières, ambitions sociales, racisme (un enfant apprend notamment que sa mère a survécu à un attentat terroriste), traumatismes liés aux crimes des Khmers Rouges… à part la nouvelle éponyme, dans laquelle je ne suis jamais vraiment entrée, j’ai vraiment beaucoup aimé toutes les histoires de cet excellent recueil. Une très bonne surprise !
Publié en Février 2023 chez Albin Michel, Terres d’Amérique, traduit par Héloïse Esquié, 336 pages.