« Soeur » est le premier roman d’Abel Quentin, et un livre que nous avons mis à l’affiche du podcast littéraire Bibliomaniacs de Décembre 2019, enregistré avec Claire Berest en invitée spéciale.
On y fait la connaissance de Jenny, une adolescente qui vit dans la Nièvre. Jenny est une jeune fille banale qui mène une vie banale : ses parents ne sont pas des plus intéressants mais sont néanmoins aimants, elle habite dans un pavillon et ne manque de rien. Cependant sa vie est solitaire et vide de sens : elle n’a pas d’amis, pas de passions à part Harry Potter, et n’a pas de projet d’avenir. Un garçon de son école, Clément, lui plait bien, mais lorsqu’elle essaie de l’embrasser en pensant qu’il s’intéresse à elle, celui la repousse, et l’humiliation de Jenny, qui a été filmée, fait le tour de l’école. Désespérée, l’adolescente poste son mal-être sur un forum Internet : une fille de son âge, Dounia, prend alors contact avec elle…
Dans ce roman, Abel Quentin nous montre comment une vie peut basculer, prendre un virage radical – si j’ose dire – en l’espace de quelques semaines. Jenny est à la recherche de quelque chose qui remplirait sa vie, cause et amitié, et c’est l’islamisme qui va le lui apporter via Dounia – si celle-ci avait été fan de métal ou de marche, Jenny serait partie avec elle en festival ou en randonnée. La jeune fille est énergique, grande gueule, et elle ouvre Jenny à la camaraderie, à la sororité via un groupe d’adolescentes avec qui elle va au fast-food et avec qui elle discute religion et histoires de cœur.
L’auteur a créé deux personnages féminins très réussis – Jenny n’est pas attachante, car elle est terne et suiveuse, mais on s’y attache finalement quand même, et notamment quand elle erre en région parisienne, car on comprend son vide et son mal-être adolescent, et on ne souhaite qu’une chose, qu’elle se réveille de ce mauvais rêve et qu’elle rentre chez ses parents. Dounia est vive et gouailleuse, et elle emploie son énergie de façon négative, mais elle aussi n’a que seize ans et aurait pu prendre une autre direction.
Le récit alterne entre Jenny et le Président de la France, Saint-Maxens, un homme vieillissant, en décalage avec les citoyens de plus en plus tournés vers le populisme de son rival politique. Si j’ai compris pourquoi Abel Quentin avait choisi cette construction, j’ai néanmoins préféré de loin les parties consacrées à la jeune fille, les parties de Saint-Maxens me semblant beaucoup plus ternes… Ce sera mon bémol pour ce livre que j’ai vraiment beaucoup aimé et qui a su mêler avec succès adolescence et actualité.
« Soeur » est un premier roman vraiment réussi, et j’attends avec impatience le prochain livre d’Abel Quentin.
Publié en Août 2019 aux éditions de l’Observatoire, 256 pages.
25e lecture de la Rentrée Littéraire de Septembre 2019.
Retrouvez le podcast littéraire Bibliomaniacs de Décembre 2019 en compagnie de Claire Berest ici.
Je suis assez d’accord avec toi. Quoi qu’il en soit, j’ai trouvé ce roman très réussi.
vivement le prochain !