« Les Danseurs de l’Aube » de Marie Charrel évoque un homme ayant réellement existé, dont le rôle dans la Résistance contre les Nazis est méconnu, Sylvin Rubinstein.
Le récit alterne entre les années 30 et 40, et la période actuelle. En 2017, un jeune danseur, Lukas, souffre de son androgynie et s’interroge sur son identité. Avec des amis, il organise un voyage sur les traces de celui qui est son modèle : Sylvin Rubinstein, décédé en 2011 à l’âge de 96 ans, danseur de flamenco qui jouait de l’ambiguïté de ses traits pour se produire travesti en femme. Dans un cabaret, Lukas rencontre une jeune fille de son âge, Iva, qui a fui la Hongrie hostile à ses origines roms. Elle a le duende, le feu sacré du flamenco. Tous deux vont parcourir l’Europe et danser en duo sous le nom d’Imperio et Dolores, le nom de scène de Sylvin Rubinstein et sa jumelle Maria dans les années 30…
Sylvin et Maria sont nés en 1914 à Moscou, enfants illégitimes d’un père russe blanc qui sera tué par les bolchéviques, et d’une mère juive polonaise. Dès l’adolescence, les jumeaux se font remarquer par leur talent et connaissent rapidement un certain succès en se produisant en duo sur les plus grandes scènes européennes, même si l’accession au pouvoir d’Hitler leur interdit bientôt de danser en Allemagne puisqu’ils sont juifs. Le danger se rapproche lorsque les Nazis envahissent la Pologne, où résident les jumeaux: Sylvin entre dans la clandestinité et est approché par un officier allemand, Kurt Werner, pour rejoindre un réseau de résistance. Maria, quant à elle, va chercher leur mère dans leur village d’origine pour la mettre à l’abri, mais les deux femmes disparaissent. Sylvin apprendra qu’elles ont été arrêtées, déportées et tuées à Treblinka. Il va alors devenir un redoutable tueur de nazis, se travestissant régulièrement en femme afin d’atteindre plus facilement sa cible.
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt cet épisode historique, original et méconnu, qui mêle résistance, danse, gémellité, et dualité – celle, homme/femme de Sylvin, et celle nazi/résistant de Kurt Werner, autre personnage fascinant. J’ai été moins convaincue par les aventures de Lukas et Iva, qui n’ont pas cette force que peut donner le récit de faits réels se déroulant au sein d’une période historique riche et complexe , mais j’ai néanmoins aimé cet effet miroir entre les deux duos, le duo actuel étant également confronté à la discrimination et à la haine. Le fait qu’un personnage méconnu donne, plusieurs décennies plus tard, du courage et un but à un jeune homme qui se cherche, qui est confronté aux doutes et à l’hostilité, m’a en effet beaucoup plu, tout comme le fait mais que la danse de Lukas et Iva, immortalisée par une photographie, devienne un symbole de résistance et de liberté.
Un roman original, qui mêle réalité et fiction pour nous parler d’un morceau d’Histoire via un angle universel.
Publié en Janvier 2021 à l’Observatoire, 252 pages.
5e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2021.
une découverte pour moi que ces jumeaux danseurs victimes de la barbarie nazie
je comprends ton intérêt 🙂
oui, une histoire méconnue et vraiment originale !