J’avais beaucoup aimé « Les Femmes du North End » de Katherena Vermette, autrice canadienne que j’ai eu le plaisir de rencontrer à une précédente édition du Festival America.
Dans « Les Filles de la Famille Stranger », elle nous raconte l’histoire d’une lignée de femmes d’une famille métisse autochtone à travers 4 personnages. Margaret est une femme frustrée et aigrie, qui avait de grandes ambitions et qui a touché ses rêves du doigt avant que tout vole en éclats. Elsie, sa fille, est une junkie, brisée par un drame. Phœnix, la fille aînée de celle-ci, est en prison. Cedar, la cadette, est placée dans une famille d’accueil.
Toutes quatre sont très bien incarnées, très bien décrites dans leurs ambivalences. Il n’y a rien de manichéen dans la manière dont elles sont présentées. Il y a de nombreux drames dans cette histoire, sans pour autant qu’il y ait un véritable événement déclencheur (les arrière-grands-parents sont par exemple un couple uni, aimant et travailleur): il y a de mauvaises décisions, des opportunités manquées, des morts précoces … la plupart des hommes sont absents – inconnus, morts, lâches ou en prison… mais ceux qui sont présents ne sont pas forcément bons pour autant.
Margaret aurait sans doute eu une meilleure vie sans le poids familial, Elsie, à l’inverse, immature et vite perdue, s’en serait mieux sortie si elle avait été plus entourée. A un moment donné, l’autrice pointe du doigt la mémoire du sang, celle de la violence infligée aux ancêtres, qui pousse vers une spirale négative. Pourtant, malgré ces drames, il y a toujours de la lumière dans ce livre : une seconde chance pour un père, des retrouvailles, l’espoir d’un futur meilleur.
J’ai vraiment adoré ce livre, si bien écrit, aux personnages qui sonnent juste. Il m’a manqué quand je l’ai fini, j’aurais aimé encore plus de pages, d’autant plus que certains faits ne sont pas développés (l’histoire du beau-père, la raison de l’emprisonnement de Phoenix…)
Un très beau roman !
Publié en Février 2025 chez Albin Michel (Terres d’Amérique), traduit par Hélène Fournier, 464 pages.