Difficile de passer à côté de « My Absolute Darling », premier roman de Gabriel Tallent, dont on entend énormément parler depuis quelques semaines – il a notamment été porté aux nues par notre ami François Busnel…étant une inconditionnelle des éditions Gallmeister, j’étais donc curieuse de découvrir cet ouvrage annoncé comme sombre et déstabilisant.
Et en effet, « My Absolute Darling » nous plonge dans le monde de Turtle (Julia à l’état civil) , une adolescente de quatorze ans qui vit seule avec son père, sa mère étant morte il y a longtemps, dans des circonstances mystérieuses. Le père et la fille habitent dans une sorte de masure isolée, proche des bois. La seule vie sociale de Turtle est au collège, où elle ne se mêle pas aux autres, passant juste le temps jusqu’à l’heure de la sortie. Son professeur d’anglais, Anna, se préoccupe de ses mauvais résultats et de son attitude qui ne lui permettront peut-être pas d’entrer au lycée, mais Martin, le père de Turtle, n’est pas du genre à être impressionné par le corps professoral. Massif, plein de violence en apparence contenue, l’homme est à la fois un grand lecteur mais aussi un passionné d’armes qui a entraîné sa fille à tirer depuis son plus jeune âge, et la force à se soumettre à des épreuves physiques et d’intimidation.
Le père et la fille ont une relation exclusive, ce qui inquiète le grand-père paternel de Turtle, qui commence à avoir des soupçons. On découvre peu à peu le quotidien de la jeune fille, fait de violences et de privations, mais aussi sa personnalité, à la fois très dure et dépendante de son père, pour lequel elle éprouve une relation amour-haine. Mais un jour, Turtle rencontre un adolescent un peu plus âgé qu’elle, Jacob. Les sentiments qu’elle éprouve pour lui lui font prendre conscience de ce qu’elle subit, mais cette attirance et sa volonté de se détacher de son père pourraient lui être fatales…
« My Absolute Darling » est effectivement un roman très marquant. Il y règne une atmosphère poisseuse, une sensation d’enfermement. Le personnage de Turtle est extrêmement bien réussi – certes la jeune fille est une victime de ce père abusif, mais alors même qu’elle est enfermée par lui dans cette relation exclusive et malsaine, sa personnalité et son désir de vivre lui donnent la force de prendre du recul et d’essayer de se détacher de son emprise. Il y a donc un côté psychologique très développé dans ce roman, qui est profondément ancré dans la culture américaine, avec un lien fort avec la nature et les armes.
L’écriture de Gabriel Tallent est subtile, notamment lorsqu’il décrit la violence et les abus, jamais je n’ai trouvé qu’il en rajoutait pour rendre les scènes plus fortes ou plus horribles. Si j’ai vraiment beaucoup aimé ce livre, j’ai néanmoins quelques bémols, notamment sur la grande scène d’affrontement qui pour moi part dans tous les sens et aurait mérité plus de sobriété, et sur la scène finale qui a contrario manquait de force et m’a un peu déçue.
Ce ne sont bien sûr que des détails – il ne faut pas oublier que c’est un premier roman – et il est manifeste que « My Absolute Darling » de Gabriel Tallent est une entrée fracassante dans la littérature. C’est un roman coup de poing qui ne ménage pas le lecteur, un roman d’apprentissage à la dure, un livre plein de noirceur qui ne tombe pas pour autant dans la facilité ou le pathos…A ne pas manquer!
Publié en Mars 2018 chez Gallmeister, traduit par Laura Derajinksi, 464 pages.
19e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2018.
Merci beaucoup à Léa Touchbook et aux éditions Gallmeister!
J’ai beaucoup aimé, notamment l’écriture et la personnalité de Turtle, toutefois je ne le recommanderais pas à tout un chacun… je suis sûre que certains vont détester, c’est un roman qui ne provoque pas d’avis tièdes, je pense.
il n’est pas exempt de défauts mais c’est effectivement un roman qui n’est pas fait pour tout le monde!
Je pense que je n’ai pas lu le même roman! Deux petites étoiles!!!
J’ai lu ton billet, je suis d’accord avec toi pour les dialogues, la façon dont Jacob parle m’a laissée perplexe!
Difficile, en effet, de passer à côté ! J’ai noté ce titre, suite à diverses critiques élogieuses, et ce que tu en dis me rend d’autant plus impatiente de le lire… « atmosphère poisseuse »… il est pour moi !
j’espère qu’il te plaira autant qu’à moi!
Je suis en train de le finir. J’ai besoin de l’arrêter souvent, tellement, je trouve ça dur, éprouvant !
certaines scènes mettent effectivement très mal à l’aise…
5 coeurs ! woaw – mon avis est beaucoup plus mitigé (3 étoiles) que le tien (Marie-Claude est beaucoup plus déçue)
je n’ai pas eu peur, ni éprouvé de sentiment particulier pour l’héroïne, j’ai trouvé les dialogues des intéressants improbables et la fin pareille pas du tout compris. J’ai par contre aimé la nature et la relation père-fille, du moins comment elle est décrite.
j’ai des bémols, mais j’ai beaucoup aimé le personnage de Turtle et la dimension psychologique du roman…hâte de lire ton billet!
Les avis sont vraiment très partagés, c’est assez intriguant. Je finirai bien par y venir pour me faire ma propre opinion. Ca me fait un peu penser à La nature des choses de Charlotte Wood, dans le côté c’est horrible mais je continue de lire.
je ne connais pas du tout ce livre, et après avoir lu le résumé, ça a l’air assez horrible…je pense que My Absolute Darling est quand même plus soft…
On verra, il arrive à la bibli, rien ne presse (les atmosphères poisseuses et la violence, pas trop mon truc d’ordinaire)
là tu vas être servie!
Tu n’es pas aussi enthousiaste que la très grande majorité des lecteurs et j’avoue que ce n’est pas pour me déplaire. J’ai toujours des doutes quand l’unanimité ne souffre d’aucun bémol 😉
c’est quand même rare de n’avoir aucun bémol sur un livre, même tout petit quand on a un coup de coeur!
Bonjour Eva, malgré que tu en dises du bien et après avoir lu le résumé, je ne suis pas trop tentée. Bonne journée.
c’est effectivement un livre qui ne plaira pas à tout le monde! bonne soirée Dasola!
A vous lire j’ai l’impression que David Vann a couché avec Joël Dicker ???? Clairement pas pour moi alors
le récit n’est pas toujours très maitrisé, mais on est très loin de Joël Dicker, je te rassure! 😀 David Vann, oui, pourquoi pas, pour les passages très sombres (je ne suis pas fan de l’auteur, je n’ai pas aimé Sukkwan Island)
Pour moi ce fut un coup de coeur! Même si l’histoire est parfois dure…Mais un peu comme avec David Vann qui est un de mes écrivains préférés et qui dès la sortie de « Legendes of suicide » m’a donné envie de lire de la littérature un peu plus contemporaine que Jack Kerouac ou Salinger, je n’ai pas lâché une seconde ce livre!
j’ai un peu de mal avec David Vann…j’en aime un sur deux 😀