Shtum – Jem Lester

« Shtum » de Jem Lester est un roman que j’avais repéré il y a un certain temps chez Electra et que j’ai acheté juste avant le confinement. Shtum signifie silencieux en yiddish, et effectivement, il y a beaucoup de silence dans la vie de Ben, le narrateur. Avec sa femme Emma, il a un fils, Jonah, qui est autiste profond. Jonah ne parle pas, il s’exprime via des rires, des colères ou des angoisses. A dix ans, il n’est toujours pas propre, et dort très mal. Malgré l’amour qu’ils portent à leur fils, Ben et Emma sont à bout et n’arrivent plus à faire face.

L’école que fréquente Jonah ne le stimule pas, et il fait très peu de progrès: ses parents décident de faire un recours en justice pour que Jonah puisse être pris en charge dans un internat beaucoup plus adapté à ses besoins. Emma annonce à Ben que le dossier de Jonah aura plus de chance d’être accepté s’il est indiqué que ses parents sont séparés et que c’est son père qui l’élève seul. Elle quitte Ben, qui se résout à aller vivre chez son propre père, Georg, avec Jonah : en entendant les histoires que le grand-père raconte à son petit-fils, Ben découvre tout un pan de son histoire familiale que son père lui avait toujours tu. 

« Shtum » est inspiré de la vie de Jem Lester, lui-même père d’un enfant autiste. Le roman est tragi-comique, on sent toute la souffrance de Ben, désemparé devant son fils, qui a besoin d’un accompagnement professionnel qu’il ne peut pas lui fournir, et qui voit partir sa vie en lambeaux : il est alcoolique, est censé diriger l’entreprise créée par son père mais cela ne l’intéresse absolument pas et il passe plus de temps au pub qu’au bureau, et son couple bat sérieusement de l’aile. Et pourtant, dans les situations décrites et dans les dialogues, il y a toujours une pointe d’humour toute britannique.

« Shtum » est un roman d’hommes. Deux relations père-fils nous sont racontées, celle de Ben et Jonah, et celle de Georg et Jonah. La cohabitation des trois générations sous le même toit va permettre de rompre la tradition familiale du silence puisque Ben va enfin en savoir plus sur la vie de Georg, né en 1934 à Budapest dans une famille juive . Mais il y a également des histoires d’amitiés dans « Shtum »: Ben et Johnny, Jonah et Tom, le fils de Johnny, et Georg et Maurice, qui se sont connus enfants dans l’Europe dévastée par le nazisme et qui ne se sont jamais quittés depuis.

« Shtum » est un très beau livre qui n’occulte rien des difficultés rencontrées par Ben tout en reflétant tout l’amour que le père a pour son fils. Un roman riche et émouvant.

Publié en 2019 chez Stéphane Marsan, traduit par Emmanuelle Ghez, 329 pages.

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