La Rue de l’Ours – Marie Desplechin et Serge Bloch

Joli moment de lecture avec « La Rue de l’Ours », les mémoires de Serge Bloch, portées par la plume de Marie Desplechin et illustrées par l’artiste.

Vous connaissez certainement Serge Bloch, à l’origine avec Dominique de Saint-Mars des fameux Max et Lili. Il raconte ici, maintenant que la plupart des protagonistes de l’histoire sont décédés, maintenant que la boucherie familiale, qui avait pignon sur rue, n’est plus qu’un souvenir, sa jeunesse à Colmar, où il est né dans une famille juive en 1956.

C’est un récit plein de tendresse, de pudeur et de nostalgie, mais aussi d’humour, qui évoque un monde désormais révolu. Celui d’une petite ville de province, qui ne ressemble pas encore aux cartes postales d’aujourd’hui; celui d’une région où selon les générations, on naît allemand ou français, où l’on parle alsacien; celui d’un microcosme juif ashkénaze, avant l’arrivée de ceux d’Afrique du Nord.

C’est l’histoire d’une famille où les femmes ont pour nom de jeune fille Bloch, et où leurs maris s’appellent Bloch aussi, où la vie s’articule autour de la boucherie fondée par le grand-père, rue de l’Ours. C’est l’histoire d’un couple qui s’aime, que tout semble opposer sur le papier, entre le père taiseux, « l’ours » à l’image de la rue qui rassemble sa famille, et la mère sociable et ouverte aux autres, qui se connaissent depuis qu’elle est née et se marieront trente ans après leur rencontre.

C’est l’histoire d’une famille miraculeusement épargnée par la Shoah, où l’on évoque peu la guerre, même si elle se rappelle parfois à eux, via un homme ému à la vue des enfants, lui dont les siens ont été assassinés, ou via un voisin gitan qui a été déporté.

Serge Bloch n’exerce pas du tout le même métier que son père, son oncle et son grand-père, et pourtant, des artisans à l’artiste, il y a une maîtrise, une patience, une générosité en commun, et une économie dans son dessin comme dans la parole de son père.

Un récit émouvant, parfois drôle, tout en simplicité et profondeur.

Publié en 2018 à l’Iconoclaste, 175 pages.

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