C’est dans le cadre du non-challenge de Galéa que j’ai découvert ce roman, coup de cœur de Jérôme.
Je pense que c’est vraiment un roman « quitte ou double », soit qui emporte soit qui laisse complètement froid, mais qui m’a enthousiasmée.
Un soir, après le dîner, j’essaie, pour voir. Je laisse ma peau de fille dans le fauteuil vert et je me glisse dans celle de mon frère que j’éteins d’un claquement de doigts : couché, Fabrice ! Dans le salon étouffant, les bûches craquent. Personne ne se rend compte de rien. Je me coule dans ma nouvelle peau d’homme, je visite. Je m’étire jusqu’au bout des grosses mains calleuses, des pieds meurtris, sous le plafond hérissé de racines de cheveux, et je me pose sur l’entrejambe au sexe qui déborde, balle sur balle, et le pénis mou dessus. Je respire largement dans ces épaules carrées. La pomme d’Adam, boule de mie de pain coincée. Une énergie brûlante, tapie dans les muscles, prête à bondir. Une extrême fatigue aussi. Dans les joues, mille pointes de barbe m’assaillent. Lentement, je commande à l’une des mains d’homme de se fermer. Puis de s’ouvrir. Leur palmure est sombre et velue.
Nous entrons dans une zone de tombeaux monumentaux. Dans le faisceau de nos torches, des sortes de caveaux décorés défilent. Le vieux Joseph pousse une porte moisie qui se couche au ralenti dans un nuage de vase. Derrière, un couloir étroit dont nos palmes font voler l’épais tapis vert-de-gris, révélant un carrelage d’échiquier fissuré. Nous sommes des découvreurs d’épaves. Sous la main noire du vieux Joseph, les portes gonflées tombent silencieusement dans la purée grise, dévoilant des contours familiers. Ma lumière accroche des lambeaux de papier à fleurs décolorés qui agitent mollement leurs tentacules fatigués, des restes de lambris courbes, hérissés de clous rouillés. Des chapelets de bulles traversent
La nuit, le vent du nord souffle si fort qu’il claque des branches contre la maison et siffle sous le toit. Je visite mon corps de l’intérieur. Sa grande charpente d’os comme une cale de bateau. Son souple entrelacs ondulant d’organes et de boyaux.
Son réseau de fins tuyaux où le sang pulse, rouge et bleu. Le double soufflet régulier de ses poumons. La pompe sourde de son coeur. La centrale électrique dans sa petite boîte d’os, là-haut, au coeur du coussin mou et strié replié sur lui-même, au secret.
il m'attend sagement…
moi bizarrement ce sont toujours des livres qui ne sont pas dans ma PAL que je lis 😉
Il me fait peur ce livre, comme tu dis c'est quitte ou double, mais je crains toujours de tomber du mauvais côté en fait…mais plus ça avance, plus je me dis pourquoi pas!
il est très court, donc même si tu n'aimes pas, ce n'est qu'un tout petit mauvais moment à passer 😉
Quitte ou double, c'est ça qui est bien je trouve. Et tant pis si on retombe du mauvais coté, on aura au moins tenté sa chance (en même temps c'est facile pour moi de dire ça vu que j'ai été enchanté par ce texte^^).
et tu en as très bien parlé, vu que tu m'as convaincue 🙂
Déjà noté… son tour viendra.
et un de plus sur la LAL 🙂