Sagan 1954 – Anne Berest

 

Après avoir lu – et beaucoup aimé – « Bonjour Tristesse », le hasard a fait que je suis tombée quelques jours après sur un exemplaire de « Sagan 1954 » d’Anne Berest.

Comme le titre l’indique, le roman retrace quelques mois de la vie de Sagan en 1954 à partir du moment où elle dépose son premier tapuscrit dans trois maisons d’édition jusqu’à la sortie du livre et son énorme succès. C’est Denis Westhoff, le fils de Sagan, qui a contacté Anne Berest pour lui proposer de rédiger un livre sur sa mère à l’occasion des 60 ans de la parution de « Bonjour Tristesse ». L’auteur n’échappe pas à la mode actuelle, qui est de raccrocher sa propre vie à celle d’une personne célèbre, et entremêle cette mini-biographie de Sagan, avec ses recherches et sa vie personnelle, alors qu’elle est en plein divorce,  livrant « une forme bizarre, entre roman, biographie et autofiction. »
Je ne suis pas fan de ce genre de mélange, mais le personnage de Sagan jeune fille est tellement intéressant, tellement hors-norme dans son ultra-modernité pour l’époque, comme pour maintenant, que je suis passée outre mes réserves pour dévorer ce roman. Ce n’est pas vraiment une biographie, plutôt une tranche de vie de quelques mois en 1954 même si Anne Berest retrace l’atmosphère familiale, les relations de Sagan avec sa maison d’éditions, et son amitié avec Florence Malraux, que l’auteur a rencontrée pour l’occasion.
C’est un livre court, et je suis un peu restée sur ma fin, désirant en savoir encore plus sur cette jeune fille aventureuse, moderne, talentueuse, voulant croquer la vie à pleines dents- Anne Berest montre très bien à quel point cette jeune fille bourgeoise, issue d’une famille moderne et fantasque, fut un détonateur dans cette période pré-mai 68 où il n’y avait pas encore d’adolescents, où on passait directement de l’enfance à l’âge adulte, et souligne également l’influence parallèle de Bardot, toutes les deux accédant à la célébrité en même temps et au même âge, et provoquant une rupture avec les codes de la société d’alors. Je me moque de la vie privée et amoureuse d’Anne Berest, mais son exemple montre bien à quoi point Françoise Sagan est encore aujourd’hui un symbole de volonté et de liberté, qui pousse à aller de l’avant, et à quel point elle est toujours un objet de fascination.

Il y a de jolis passages sur l’écriture, notamment celui-ci:

Mais faire lire son manuscrit à ses proches est une chose tout à fait différente et aussi désagréable que de les voir ouvrir la porte de votre salle de bains tandis que vous êtes nue sous la douche. Tout le monde est embarrassé, on est bien obligés de faire comme si rien de tout cela n’était jamais arrivé, de ne pas en parler sauf brièvement avec un sourire contrit – et puis on essaye de ne plus y penser. Le cas contraire me semble rare, car celui qui écrit un livre qui enchante ses parents peut, c’est mon avis, se poser des questions sur la pertinence de son oeuvre.
Les fans de Sagan préféreront sans doute lire une biographie complète sur l’écrivain, mais j’ai passé un excellent moment avec ce petit livre non dénué de défauts mais très agréable à lire et qui donne une image de Sagan vivante et pétillante, toujours très actuelle.
Publié le 30 avril 2014 aux Editions Stock, 198 pages.

7 commentaires sur “Sagan 1954 – Anne Berest

  1. J'ai lu aussi que ce parallèle Sagan/Berest n'apportait rien à la tentative de bio, qu'il aurait mieux valu que l'auteur s'efface derrière son sujet..
    J'ai lu une biographie de Sagan, bien écrite, c'est de Marie-Dominique Lelièvre, Sagan à toute allure, Paris, Denoël, 2008.

  2. J'avais été tentée par ce livre à sa sortie, et ICB avait fait un article qui vraiment reprochait à Berest de se mettre en scène et tu sais à quel point j'ai du mal avec ces auteurs qui ne peuvent s'empêcher de nous raconter leurs soucis, donc 'j'ai passé. Mais comme toi, j'ai une passion pour Sagan, je crois les avoir presque tous lu. C'est une très grande romancière de l'intime.

    1. en fait "Bonjour tristesse" est le seul livre que j'ai lu d'elle…! il faut absolument que j'en lise d'autres… Effectivement, on s'en moque des problèmes d'Anne Berest, mais j'ai bien aimé la façon dont elle met en scène la Sagan de 18 ans, c'est très bien fait, très frais…

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