Cela faisait bien longtemps que je n’avais rien lu de Joyce Carol Oates, même si j’ai beaucoup aimé certains de ses livres, notamment « Gang de Filles ». « Premier Amour’, ce court livre, était donc l’occasion de redécouvrir cette auteur.
Josie a onze ans et ne sait pas bien pourquoi sa mère a brusquement quitté le foyer conjugal avec elle pour aller vivre chez sa grande-tante Esther dans une petite ville au bord d’un marais. L’adolescente est livrée à elle-même, entre une mère indépendante qui l’aime mais se préoccupe plus de son physique et de sa vie sentimentale, et Esther qui les a recueillies par charité chrétienne et ne s’occupe pas d’elle. Mais dans la maison séjourne également Jared, le petit-fils d’Esther, âgé de vingt-cinq ans, qui se destine à une carrière ecclésiastique, et va s’intéresser à Josie…
Le sous-titre de ce roman est « un conte gothique », et en effet tout est sombre et trouble dans ce livre. Pourquoi la mère de Josie est-elle partie de chez elle? Qu’est-il vraiment arrivé aux parents de Jared? Pourquoi celui-ci a-t-il dû quitter l’école? La maison elle-même est entourée de marais et de collines, lieux des rencontres secrètes entre Jared et Josie. Car Jared sait tirer profit de la solitude de Josie et de leur différence de maturité pour la manipuler et user de sa perversité sur elle. Mais Josie, adolescente négligée, trouve enfin quelqu’un qui s’intéresse à elle, s’occupe de son corps – même si c’est pour le blesser – et la fasse se sentir vivante, et tombe amoureuse de Jared, son premier amour, flattée qu’un jeune adulte recherche sa compagnie et lui fasse partager ses secrets.
Tout est moite et malsain dans ce roman, à l’image du marais qui borde la maison. Josie est la victime consentante d’un adulte pervers qui la domine psychologiquement et physiquement et repousse constamment les limites. La tension est palpable, car Jared veut que Josie lui prouve son amour et l’on retient son souffle en se demandant si elle va passer à l’acte et commettre l’irréparable. Tout est très bien dosé car le livre certes flirte avec le glauque mais reste néanmoins agréable à lire, avec des respirations en-dehors de la relation entre Josie et Jared.
Ce court roman est très bien maîtrisé et l’atmosphère dérangeante qui y règne sait être envoûtante. Un très bon Joyce Carol Oates qui me donne envie de découvrir « Maudits » et la trilogie gothique de Bellefleur.
19e participation au Challenge Rentrée Hiver 2015 organisé par Valérie et hébergé par Laure de Micmelo.
Publié le 5 Mars 2015 aux Editions Philippe Rey, traduit par Sabine Porte, 104 pages.
C'est toujours à douhle tranchant Joyce Carol Oates et moi, mais cette lecture là me tente bien.
Ah, ça a l'air vraiment bien. cette histoire de curé pas bien net me sonne comme ce que j'ai entendu sur "L'enfer de Church Street" qui vient de sortir chez Gallmeister et qui raconte comment un curé (un pasteur peut-être, ou évangéliste) manipule les gens crédules grâce à son ministère. J'ai bien envie de le lire. Tout comme "Bellefleur" d'ailleurs et "Maudits", mais ils sont vraiment épais… et puis j'ai "Blonde" dans ma PAL.
@ Tiphanie : vu l'épaisseur du livre, s'il ne te plait pas, au moins tu n'auras pas perdu beaucoup de temps 😉
@Sandrine : j'ai beaucoup entendu parler de "L'enfer de Church Street" également. C'est vrai que la plupart des livres de JC Oates sont des pavés, pas évident de trouver le temps de les lire!
Comme j'ai lu Church Street, je découvrirai bien celui-là pour faire le parallèle.
Je n'ai lu qu'un seul roman de Oates qui ne m'a pas vraiment plu ("les chutes"). Peut-être celui-ci me plaira davantage.
@Jérôme : et moi pareil, mais avec Church Street!
@Tant qu'il y aura des livres : pas lu les Chutes, mais c'est vrai qu'avec JC Oates, je ne suis jamais sûre que ça va me plaire…