Je n’étais pas du tout tentée de lire « Une Enfance de Rêve » de Catherine Millet, mais je l’ai quand même fait, puisque ce titre est à l’affiche de l’édition de Septembre de notre podcast littéraire Bibliomaniacs, et c’est tant mieux, puisque j’ai été agréablement surprise par ce récit autobiographique.
Autant être clair dès le départ, « Une Enfance de Rêve » – à prendre dans le sens « Une enfance passée à rêver, à imaginer », et pas « Une enfance géniale » – n’a absolument rien à voir avec « La vie sexuelle de Catherine M. », l’ouvrage qui a rendu l’auteur connue du grand public. Même si le développement du corps et de la sexualité est évoqué brièvement, le contenu de ce texte n’est pas du tout sexuel. Catherine Millet nous raconte son enfance et le début de son adolescence, avec une plume précise et élégante, très agréable à lire.L’auteur excelle dans les descriptions et je n’ai eu aucun mal à imaginer sa ville (Bois-Colombes), son habitat, et les personnages qui l’entourent que ce soit les parents, séparés au début de leur mariage par six ans de guerre et qui s’entendent très mal, la grand-mère, qui vit avec eux, et n’hésite pas à critiquer son gendre, à l’unisson avec sa fille, et Philippe le jeune frère de Catherine au caractère très particulier, qui ne serait en fait pas du même père.
Catherine Millet analyse avec un regard d’adulte les événements marquants de son enfance, ses réactions, et les impacts sur sa propre construction, une analyse fouillée et profonde, mais d’une manière que j’ai trouvée très pertinente et très fluide, me rappelant en ça Elena Ferrante, qui arrive à exposer de façon évidente et limpide des sentiments et réactions complexes. Cela m’a passionnée, alors qu’au début j’étais dubitative, car je ne voyais pas en quoi l’enfance de Catherine Millet pouvait bien m’intéresser. Rapports familiaux, goût pour la lecture et l’écriture, classes sociales, attitude des parents, relations avec les camarades de classe, tout est soigneusement décortiqué mais en même temps ce ne sont pas des analyses qui sont livrées sèchement, elles sont, au contraire, imbriquées dans une peinture vive et intéressante d’une enfance dans les années 50, ni heureuse ni malheureuse, pas vraiment originale, mais en même temps confrontée à des attitudes non-conventionnelles, notamment de la part des parents.
Dommage cependant qu’il y ait quelques longueurs (j’avoue que j’ai lu certaines pages en diagonale)…Mon plus gros étonnement porte néanmoins sur le fait qu’il n’y a aucun lien mis en avant par Catherine Millet entre cette enfance et la personne qu’est aujourd’hui l’auteur. Il y a un fossé énorme entre ce qu’elle décrit dans ce livre et « La vie sexuelle » et j’aurais aimé que l’analyse explique aussi ce qui l’a poussée à avoir ce style de vie particulier et à se mettre à nu, au propre comme au figuré. J’ai eu l’impression que ces deux livres avaient été écrits par deux personnes complètement différentes, et ce grand écart m’a laissée perplexe.
Mais « Une Enfance de Rêve » de Catherine Millet a néanmoins été une bonne surprise, où j’ai accompagné avec plaisir l’auteur dans cette introspection à la fois fine et bien écrite.
Publié le 23 Avril 2014 chez Flammarion, 283 pages, disponible en poche chez J’ai Lu.
Comme quoi il faut savoir parfois mettre ses a priori de côté et se laisser happer par un texte…
Les auteurs qui nous racontent leur enfance, je commence à saturer !
Même avis que toi Eva : des longueurs et aucun lien avec ce qu’elle est devenue… Peu d’intérêt.
@ Joelle : j'ai quand même trouvé ce livre intéressant, son analyse est très intelligente
@Jérôme : Riad Sattouf ça t'a plu,non?
@Delphine Olympe : c'est l'avantage de faire partie d'un collectif, on a l'occasion de sortir des terrains battus