« Les Lance-Flammes » de Rachel Kushner était un des romans de la rentrée de Janvier qui me faisaient le plus envie…Le New York de 1977, l’Italie des années de plomb, une fille à moto, tout semblait réuni pour faire de ce livre un vrai bonheur de lecture, d’autant plus que les louanges étaient légion, de la part de journaux prestigieux comme d’écrivains reconnus. Même la couverture était plein de promesses…Et pourtant, je suis au regret de dire que ce fut une rencontre ratée!
En 1977, une jeune femme dont on connait seulement le surnom, Reno, qui est sa ville natale, arrive à New York après des études d’art. Elle est passionnée de moto et veut percer dans le milieu de la photographie et de la vidéo. Elle rencontre Sandro Valera, un artiste plus âgé issu d’une grande famille italienne, qui l’emmène avec lui à Milan, alors que manifestations, attentats et kidnappings des Brigades Rouges se multiplient.
Qu’a voulu nous raconter Rachel Kushner? Je me pose encore la question, tant les pistes sont nombreuses dans ce livre…On se retrouve pendant la guerre de 14-18 en compagnie d’un soldat italien, à New York en compagnie d’artistes et de diverses personnes plus ou moins déjantées, en Italie dans une grande famille d’industriels milanais…Le tout avait de quoi faire un excellent roman, pourtant la mayonnaise ne prend pas. Il se passe beaucoup de choses, plus ou moins intéressantes d’ailleurs, mais j’ai été tenue à distance du cœur de l’action, regardant de loin les petits personnages s’agiter devant moi. Reno, le personnage principal, aurait pu être une formidable héroïne, jeune femme à moto, cherchant à la fois à battre des records de vitesse et à se réaliser en tant qu’artiste, pourtant j’ai trouvé qu’elle manquait d’incarnation et de profondeur et que le récit en lui-même était dépourvu du bruit et de la fureur que j’étais en droit d’attendre vus les sujets abordés.
Lorsque l’intrigue se déplace en Italie, Sandro emmenant Reno dans sa famille de grands bourgeois milanais, je me suis dit qu’enfin ça allait démarrer, et effectivement le portrait de la famille Valera et la confrontation entre leur snobisme et Reno sont plutôt réussis. Dans cette période troublée des années 70, où le terrorisme frappait tous les jours, je m’attendais à ce que l’intrigue décolle et que je sois prise dans une spirale de tension et de violence, mais las, là aussi, malgré les péripéties, l’histoire était racontée avec une sorte de froideur et de détachement qui m’a empêchée d’être emportée et conquise.
C’est vraiment ce détachement qui m’a gênée tout au long du livre : que ce soit dans les histoires d’amour, les compétitions de moto, les soirées, les scènes de violence, j’ai eu l’impression que l’héroïne était spectatrice, contemplatrice, et regardait, comme moi, de très loin ce qui se passait, complètement en contradiction avec les thèmes nerveux abordés. Comme je n’étais pas impliquée dans l’intrigue, j’ai forcément ressenti des longueurs, et me suis vaguement ennuyée tout au long de ce livre pourtant bien écrit, mais où rien ne m’a semblé vivant et percutant. Je ne dirais pas que le roman est superficiel, mais il y règne une distance et une froideur qui ne m’ont pas permise de m’intéresser vraiment à ce qu’il s’y passait – et finalement s’y passait-il quelque chose de foncièrement intéressant? Je n’en suis même pas sûre.
« Les Lance-Flammes » de Rachel Kushner, même si je l’ai lu jusqu’au début en espérant vainement que quelque chose allait se débloquer et que je finirais par l’aimer, a été une vraie déception. Il se lit sans déplaisir, mais sans grand intérêt. C’est dommage, tous les ingrédients étaient réunis pour un faire un roman du tonnerre, et pourtant ce détachement et ce manque de rythme dans le récit, associés à quelques longueurs, ne m’ont pas permis de m’attacher à ce livre. New York Magazine a trouvé que c’était « le roman le plus intéressant, le plus osé de l’année, le meilleur », et le Washington Post que c’était « une performance étourdissante »…cela me laisse perplexe.
Publié le 14 Janvier 2015 chez Stock, traduit par Françoise Smith, 560 pages.
4e participation au Mois Américain 2015 et 38e participation au Challenge Rentrée Hiver 2015 organisé par Valérie et hébergé par Laure de Micmelo
Effectivement, ça avait l'air prometteur. Dommage, dommage…
J'avais également été très déçue par ce roman. L'auteur écrit bien et le début était prometteur (art et vitesse) mais après ça part un peu dans tous les sens et c'est plein de longueurs. Il a manqué un vrai travail d'édition sur ce bouquin, je crois, et c'est dommage parce que la fille a du talent.
Ça a le mérite d'être clair!
Il ne me tentait pas vraiment à la base, mais après ce billet je ne vois aucune raison de le lire.
@tant qu'il y aura des livres: pas de regrets,alors!
@Marie-Claude : oui, pas d'avis mitigé cette fois-ci
@Papillon: je suis d'accord avec toi, il y a du talent dans ce livre, mais mal exploité et mal canalisé…je tenterai peut-être son premier livre, Telex de Cuba
@Titine: j'étais tellement sûre de l'aimer…je suis tombée de haut!
C'est intéressant de voir que si tu n'as pas aimé, c'est notamment dû au fait que les personnages ne t'ont pas intéressés, par manque de profondeur. J'ai aussi eu cette impression et je n'arrivais pas du tout à m'identifier à l'un d'entre eux (cela jour certainement beaucoup). On a bien fait de le retirer de la liste des Bibliomaniacs…
@ Fleur : oui, merci d'avoir activé la sonnette d'alarme assez tôt pour qu'on puisse changer de programme!