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Le mois de Février doit être placé sous le signe de la Guerre de Sécession, car après avoir lu « L’Oiseau du Bon Dieu » qui se passait juste avant, et « Le Monde à l’Endroit » qui évoque un de ses épisodes sombres, je vous parle aujourd’hui de « Neverhome » de Laird Hunt, qui se déroule pendant cette guerre.
« Neverhome » a d’ailleurs un autre point commun avec « L’Oiseau du Bon Dieu » : le thème du travestissement. En effet, si le roman de James McBride mettait en scène un jeune garçon se déguisant en fille pour survivre, « Neverhome » a pour personnage principal Constance, qui s’est déguisée en homme pour se faire incorporer comme soldat, laissant derrière elle à la ferme son mari Bartholomew. Si Bartholomew est un homme doux, de santé fragile, avec un caractère qui semble peu compatible avec la rudesse et la violence de la guerre, Constance, comme sa mère avant elle, est une femme robuste, ingénieuse, à la forte personnalité, mais également une fine gâchette et elle semble beaucoup plus taillée pour survivre à la guerre que son mari, à la place duquel elle s’engage.
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On suit donc Constance, renommée Gallant Ash par ses compères qui n’y voient que du feu, au champ de bataille. La jeune femme tient le coup grâce aux lettres qu’elle écrit à son mari, et aux conversations qu’elle mène dans sa tête avec sa mère décédée, une mère au caractère similaire au sien, qui l’a élevée seule et qui est son inspiration. Son seul objectif est de pouvoir un jour retrouver son mari et reprendre sa vie conjugale, et c’est cet espoir qui la porte pour survivre à la guerre, puis, après une bataille horrible qui a dispersé son escadron, dans son errance semée d’embûches pour retourner à sa ferme.
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Le thème de « Neverhome » – les femmes travesties en hommes pour s’engager dans l’armée – inspiré d’histoires vraies, est passionnant et l’écriture de Laird Hunt est très belle. Pourtant j’ai eu du mal à entrer dans ce roman et à m’attacher à l’héroïne, bien qu’elle soit un personnage assez extraordinaire. On ne peut pas dire qu’il n’y a pas d’action ou de rebondissements dans « Neverhome », ils sont au contraire nombreux, mais j’ai eu cependant du mal à me représenter la guerre et ses batailles. J’avais l’impression d’être tenue à distance du récit, de traverser ce livre dans une sorte de brume. Je pense que l’auteur a voulu montrer que la guerre vécue par les simples soldats n’est pas telle qu’on se la représente dans les livres d’histoire avec cent-cinquante ans de recul, avec des plans, des stratégies, des objectifs, mais une succession de moments confus, où on ne sait pas vraiment où on est, où on va, contre qui on se bat, et ce qui va nous tomber dessus.
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Il n’empêche que j’ai eu l’impression de traverser un rêve éveillé – ou plutôt un cauchemar éveillé – d’autant plus que les conversations avec la mère décédée donnent un côté surnaturel à ce roman. Pourtant il se passe beaucoup de chose dans ce livre, notamment durant l’errance de Constance : elle sera prisonnière plus d’une fois, s’enfuira, rencontrera plusieurs personnes marquantes… Mais ce n’est que dans le dernier épisode de ce roman que je me suis sentie dans la réalité et en phase avec le récit, comme si on m’avait réveillée.
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« Neverhome » de Laird Hunt a été un coup de cœur pour plusieurs blogueurs dont je suis les avis avec intérêt, j’ai donc été déçue de ne pas vraiment réussir à entrer dans ce roman, qui a pourtant le mérite de traiter un sujet original et intéressant, et d’être porté par une très belle écriture. Le côté « brumeux » de ce livre m’a tenue à distance, mais je lirais avec plaisir d’autres romans du même auteur pour sa plume et son choix de thème.
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Publié le 2 Septembre 2015 chez Actes Sud, traduit par Anne-Laure Tissut, 256 pages.
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40e participation au Challenge 1% Rentrée Littéraire organisé par Hérisson
J'avais adoré ce roman, je crois lui avoir mis 4 coeurs, comme toi, je pense que le style "brumeux" peut effrayer mais j'ai trouvé son portrait de la guerre très juste, comme tu le dis, les soldates eux-mêmes n'avaient aucune idée de la stratégie de leurs chefs, envoyés comme de la chair à canon. Et le romancier (dont je découvre le visage) a fait un magnifique portrait de femme !
On est clairement à la limite du rêve et de la réalité et il est vrai aussi que Constance n'est pas un personnage attachant. Mais l'écriture de Laird Hunt possède un charme indéfinissable je trouve.
Réservé depuis des mois à la biblio … no comment :)!
@ Clara : je l'ai eu rapidement, mais il y a certains livres que j'ai attendus quelques mois…bizarrement pas forcément les plus populaires d'ailleurs…
@ Jérôme : oui j'ai été conquise par l'écriture de l'auteur, j'aimerais bien lire d'autres romans écrits par lui
@ Electra : oui il y a beaucoup de bonnes et belles idées dans ce roman, dommage qu'il m'ait manqué quelque chose pour vraiment accrocher à ce récit
Ce fut un vrai coup de cœur pour moi. J'ai justement aimé cette ambiance à mi-chemin entre rêve (ou plutôt cauchemar) et réalité.
Comme toi, j'ai eu du mal à entrer dans le roman. Mais à partir de la deuxième partie, l'écriture hallucinée, très sensorielle de Laird Hunt m'a totalement embarquée 🙂
@ tant qu'il y aura des livres : je pense que c'est le genre de roman où soit on adhère à cette ambiance particulière soit on reste en retrait…
@ Lili : c'est vrai que son écriture est très belle…
Ton billet est très bien 😉 A charge et à décharge en quelque sorte