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En grande fan des polars nordiques, et plus particulièrement de l’inspecteur Erlendur, je ne pouvais pas manquer de lire le nouvel ouvrage d’Arnaldur Indridason, « Le Lagon Noir ». L’occasion de retrouver un Erlendur, non pas à l’époque contemporaine, mais en début de carrière…comme dans « Les Nuits de Reykjavik », qui m’avait déçu. Heureusement, j’ai trouvé « Le Lagon Noir » beaucoup plus réussi!
Dans « Le Lagon Noir », Erlendur s’occupe de deux enquêtes, l’une en relation directe avec son poste à la Criminelle, l’autre à titre personnel, un « cold case » qui concerne, comme souvent avec Erlendur, une disparition, celle d’une jeune fille en 1953, soit 25 ans avant l’époque du récit. Si les deux affaires ne sont pas liées, elles ont quand même un point commun : la présence américaine aux Etats-Unis. Un sujet qui semble important pour Arnaldur Indridason puisque il était déjà évoqué dans un roman policier indépendant de la série Erlendur, « Opération Napoléon ». En effet, une jeune femme se baignant dans un lagon pour soigner son psoriasis – je me suis demandée s’il ne s’agissait pas du futur Blue Lagoon que j’ai eu l’occasion de fréquenter – découvre le cadavre d’un jeune homme qui s’avère être un technicien travaillant sur la base américaine de Keflavik. Quant à la jeune fille qui a disparu il y a 25 ans, elle avait supposément un petit ami dans un endroit appelé Camp Knox – un ancien campement américain devenu un quartier populaire islandais à la limite du bidonville.
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On retrouve dans « Le Lagon Noir » un Erlendur fidèle à lui-même : obstiné, et n’hésitant pas à réouvrir une enquête vieille de vingt-cinq ans car il estime que la tante survivante de la jeune fille disparue doit découvrir la vérité sur cette affaire, comme il aimerait savoir ce qui est arrivé à son frère, mais aussi très secret, ne partageant les éléments de sa vie personnelle avec personne, même avec son supérieur Marion, qu’ils soient passés comme la disparition de son frère, ou présents comme son divorce et sa séparation avec sa fille. Les deux enquêtes sont un peu lentes, Erlendur prend son temps pour explorer chaque piste et interroger les témoins – j’ai quand même un peu tiqué sur la façon un peu « grosses ficelles » dont Erlendur retrouvait un élément important concernant le cold case… Concernant l’enquête actuelle, l’auteur montre bien l’attitude paradoxale des Islandais par rapport à la présence américaine, souvent défiants, comme Erlendur, mais n’hésitant également pas à faire de la contre-bande avec les soldats pour revendre des produits plus ou moins légaux à l’extérieur de la base, des vinyls de rock à la marijuana en passant par les jeans…Pour résoudre l’affaire, Erlendur et Marion doivent coopérer avec les autorités américaines, ce qui est tout sauf évident. Heureusement, une jeune femme noire de la police militaire, Caroline, va les aider dans leur enquête – une occasion pour l’auteur de montrer que même dans les années 70, le racisme n’est jamais loin, que ce soit du côté américain comme du côté islandais.
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« Le Lagon Noir » ne fait pas partie de mes Erlendur préférés comme « L’homme du lac » (lu avant le blog » ou « Etranges Rivages », mais il est très bien mené, avec de nombreux faux-semblants, et une importance égale donnée aux deux enquêtes. Tout comme dans « Le Duel », je me suis demandée pendant tout le roman si Marion était un homme ou une femme – donc bravo au traducteur qui a fait en sorte de respecter l’ambiguïté. Il y a de nombreux personnages dans « Le Lagon Noir », tous très bien dépeints, et qui mettent en lumière l’histoire compliquée de l’Islande, avec la grande pauvreté de l’Après-Guerre à travers les habitants de Camp Knox, mais aussi la situation géopolitique difficile durant la Guerre Froide où l’Islande était une île stratégique pour les Américains qui y maintenaient une présence forte et s’en servaient comme plateforme logistique entre les USA et l’Europe.
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« Le Lagon Noir » d’Arnaldur Indridason n’est pas le meilleur des Erlendur, mais c’est un roman solide, fouillé et bien mené où l’on en découvre un peu plus sur l’histoire islandaise comme sur l’histoire personnelle de notre inspecteur préféré. Un bon cru, surtout au niveau du cold case, que j’ai préféré à l’affaire actuelle, qui m’a consolée de la déception rencontrée avec « Les Nuits de Reykjavik ».
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Publié le 3 Mars 2016 aux Editions Métailié, traduit par Eric Boury, 317 pages.
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15e participation au Challenge Rentrée Hiver 2016 organisé par Laure de MicMelo
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J'aime l'idée de découvrir Erlendur en début de carrière (comme Mankell l'a fait pour Wallander avec "La Faille souterraine et autres enquêtes"). Impossible de passer à côté. Je suis une «Erlendurette» finie!
Bonjour Eva, j'en suis à la moitié, je trouve la lecture agréable. J'avais beaucoup aimé les Nuits de Reykjavik dont c'est vraiment la suite. Mon "Erlendur" préféré est Etranges rivages mais j'avais aussi beaucoup aimé les deux premiers La cité des jarres et La femme en vert. Bonne journée.
Une bonne lecture, donc, sans enthousiasme excessif si je comprends bien.
En tout cas, j'attends avec impatience le billet sur ta lecture en cours 😉
Je suis totalement fan (comme ma mère) nous avons lu tous ses romans aussi impossible d'être objective. Il faut les lire dans l'ordre je pense pour se sentir proche de cet homme au passé difficile. Je compte relire la cité des jarres (ma mère a eu la même idée)
@ Electra : oui je suis d'accord avec toi il faut les lire dans l'ordre – je pense d'ailleurs tous les relire très bientôt!(et nous aussi on les lit en famille -mais c'est plutôt mon père :))
@ Delphine: oui il est bon sans être transcendant! Pour le Carrère, je le lis chronique par chronique de façon non suivie, donc cela risque de prendre un peu de temps 😉
@ Dasola: oui c'est une lecture agréable…il faut que je relise La Cité des Jarres et La Femme en Vert je les ai lus à leur sortie, et ça commence à dater
@ Marie-Claude : je trouve Erlendur très attachant! (alors que paradoxalement il se livre peu et reste assez mystérieux) en tout cas, une série de policiers à ne pas rater