« Envole-moi » est le troisième roman de Sarah Barukh : Anaïs, trente-huit ans, vit à Nice et essaie désespérément d’avoir un enfant. Alors qu’elle vit dans la peur d’une nouvelle fausse couche, elle reçoit un appel de son amie d’enfance Marie, dont elle n’a plus de nouvelles depuis longtemps. Celle-ci lui annonce le décès de sa mère, et lui demande de la rejoindre pour l’enterrement. Anaïs, qui a besoin de se changer les idées, accepte de se rendre à Paris pour retrouver Marie.
Anaïs et Marie se sont connues enfants dans une cité du XIXe arrondissement. Si Marie a été élevée par une mère célibataire fantasque, Anaïs a grandi dans une famille beaucoup plus unie et traditionnelle. Marie était très jolie et attirait tous les garçons, Anaïs était la bonne élève complexée par ses rondeurs. Malgré ces différences, les deux jeunes filles étaient très liées jusqu’en 1993, où deux événements sont venus fissurer cette amitié très forte.
Sarah Barukh revisite les années 80 et 90 dans une cité parisienne. Une période dont la narratrice, Anaïs, se souvient avec nostalgie : malgré la violence, dehors (bande de jeunes qui traînent et s’affrontent, bagarres, insultes, moqueries) mais aussi dans les foyers (maltraitance, pédophilie, excisions, addictions…), elle a beaucoup de souvenirs heureux de sa bande de copains, et d’un temps où les ados de toutes origines et de toutes religions étaient rassemblés autour de la musique et du sport. Puis viendra le temps où l’extrémisme religieux fera son apparition, ainsi que le communautarisme, qui cloisonneront les individus et les monteront les uns contre les autres. Anaïs, qui est juive, en fera d’ailleurs les frais.
Ce roman est très riche, de nombreux thèmes y sont abordés, et notamment le fait de ne se sentir nulle part à sa place : l’antisémitisme qui fait son apparition dans la cité stigmatise Anaïs, mais elle qui vient d’un milieu modeste se sent également mal à l’aise dans le lycée privé des beaux quartiers où ses parents l’envoient – elle n’a pas les bons codes, ni le budget nécessaire pour se fondre dans la masse.
Il y a beaucoup de passages touchants et qui sonnent justes dans ce livre qui montre la difficulté à avancer dans la vie lorsque les blessures de la jeunesse ne sont pas refermées, lorsque la culpabilité, les mensonges, les non-dits du passé empoisonnent le présent. Nul doute que Sarah Barukh a mis beaucoup d’elle-même dans « Envole-Moi ». Si les passages concernant la jeunesse des protagonistes m’ont beaucoup plu, j’ai été moins convaincue par le road-trip dans lequel se lancent Marie et Anaïs, et par certaines scènes de l’époque actuelle qui m’ont semblé peu crédibles, mais c’est néanmoins un roman que j’ai lu avec intérêt .
« Envole-Moi » est une jolie découverte, et Sarah Barukh une autrice que je lirai de nouveau avec plaisir.
Publié en Janvier 2020 chez Albin Michel, 304 pages.
28e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2020.
je ne connais pas, mais c’est bien que tu mettes en avant ce livre ! Même si je passe mon chemin (tu connais mon rapport aux livres français)
à part Antonin Varenne ^^
Je l’ai personnellement adoré – mais j’adore tous les romans de Sarah Barukh, quel que soit le sujet qu’elle aborde !
oui tu m’avais dit! il faut que je lise les deux autres !
je pense que ce n’est pas pour moi… le désir d’enfant n’a jamais passé par moi alors je suis un peu étrangère à ce thème.
c’est un des thèmes du roman en effet, mais il y a aussi tout un pan sur l’adolescence, que j’ai trouvé très intéressant.