Une Machine Comme Moi – Ian McEwan

Je n’avais encore jamais lu de romans d’Ian McEwan, même si j’avais vu l’adaptation au cinéma de son livre « Expiation », et j’ai donc découvert cet auteur avec sa dernière parution, « Une Machine Comme Moi ».

Le récit est une uchronie qui se déroule dans le Londres de 1982, au moment de la guerre des Malouines. Cette époque ressemble en fait beaucoup à la nôtre, au niveau des avancées technologiques : les personnages sont équipés d’ordinateurs, ont accès à Internet, et l’intelligence artificielle est en plein essor. Le choix de 1982 – outre le contexte historique de la guerre avec l’Argentine – me semble finalement surtout lié au fait qu’il permette de faire intervenir dans le récit Alan Turing  – qui ne s’est ici pas suicidé en 1954 -puisqu’il est né en 1912 et a donc soixante-dix ans au moment des faits, et de lui rendre hommage

Charlie est un trentenaire qui vient d’hériter d’une coquette somme. Féru de nouvelles technologies, il décide d’utiliser cet argent (86 000 livres, tout de même) pour acheter un androïde, une nouveauté qui n’a été produite qu’à 25 exemplaires : 12 « Adam » et 13 « Eve ». L’Adam dont il est désormais propriétaire va développer sa propre personnalité, en fonction des interactions qu’il aura avec Charlie. Celui-ci propose à Miranda, sa voisine étudiante qui est devenue sa petite amie, de participer également à l’enrichissement de la personnalité d’Adam. Mais très vite, Adam prend une place prépondérante dans la vie de Charlie, et dans sa relation avec Miranda, et ses propres valeurs vont entrer en collision avec les projets de son propriétaire…

« Une Machine Comme Moi » m’a rappelé une série suédoise diffusée sur Arte que j’avais beaucoup aimée, « Real Humans ». Le roman est très riche, car il aborde de nombreux thèmes de façon pertinente et notamment la relation homme-machine et la rivalité qui en découle. Doté d’une capacité d’analyse et d’apprentissage très poussée, Adam est capable de faire tout ce que fait Charlie, mais en mieux. Comme lui, il peut faire la cour à Miranda, lui donner du plaisir, mais aussi le remplacer dans son travail- ici avec un résultat qui profite à Charlie – celui-ci gagne sa vie en boursicotant en ligne, et Adam, en le remplaçant, atteint un retour sur investissement bien meilleur. Charlie récupère donc des sommes d’argent importantes tout en pouvant bénéficier du temps libre puisqu’il n’a plus besoin d’être devant son ordinateur toute la journée.

Mais le roman aborde également le thème de l’éthique. Adam a été programmé pour respecter scrupuleusement la Loi, et s’insurge de certains choix et mensonges de Charlie ou de Miranda, même si c’est « pour la bonne cause ». Adam veut donc remettre de l’ordre et de la légalité dans leur vie, quitte à ce que ses actes aient de lourdes conséquences pour les deux personnages et entraînent également des dommages collatéraux.

Bien que le point de départ d' »Une Machine Comme Moi » soit l’introduction d’un androïde dans la vie d’humains, le roman reste accessible aux lecteurs qui ne sont pas férus de nouvelles technologies ou de science-fiction car les questions qu’il pose – et notamment d’ordre éthique – sont finalement universelles. C’est un livre qui fait réfléchir tout en restant très fluide et plaisant à lire. Cette première rencontre avec Ian McEwan est une réussite, qui me donne envie de découvrir d’autres œuvres de ce romancier britannique. Une très bonne lecture !

Publié en Janvier 2020 chez Gallimard, traduit par France Camus-Pichon, 400 pages.

41e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2020.

19 commentaires sur “Une Machine Comme Moi – Ian McEwan

  1. J’ai lu plusieurs de ses romans, Expiation adapté au cinéma, titre français Reviens-moi, bien, et surtout Samedi qui m’avait enthousiasmée. En revanche Solaire m’a résisté… peut-être pas le bon moment… Le jardin de ciment, une histoire terrible, il y a du choix! Bonne semaine
    Brigitte

  2. Beaucoup aimé la série « Real Humans » aussi. Quant à ce roman, je l’avais repéré à sa sortie et je pense que je finirai par le lire, même si ma seule expérience avec l’auteur (« Sur la plage de Chesil ») n’avait guère été concluante, mais bon, le thème de celui-ci est tout à fait dans mes goûts.

  3. j’ai immédiatement pensé à la série suédoise du coup mon intérêt à diminuer
    je pense aussi que pour la partie sur la réflexion homme/androïde il n’y a pas plus beau et plus fort que Blade Runner ..
    du coup si je lis un jour cet auteur, ça sera pour un autre de ses romans, je vois que tu as aussi aimé le style et la profondeur des personnages donc des bons points

  4. Ce roman est très bien accueilli, dans l’ensemble.. il me tente assez, cela me rappelle un peu la thématique d’Ada, de Bello, que j’ai beaucoup aimé.
    Mais cela attendra la sortie en poche, j’ai un des vieux titres de McEwan (Délire d’amour) sur ma PAL, que je lirai avant..

  5. J’espère que tu vas poursuivre avec Mc Ewan 🙂
    Il a une formation scientifique à la base et ça se sent dans la façon de poser ses raisonnements même si on est bien dans un champ littéraire.
    A part Expiation (qui est mon préféré de lui) je pense que tu pourrais aimer Samedi 🙂

  6. Comme toi, j’ai vu Expiation et noté une bonne dizaine de titres de cet auteur sans jamais encore en lire un. Ahem, parfois on en sait pas pourquoi on retarde autant notre rencontre avec un auteur. En tous cas la thématique de ce dernier titre me tente bien (et j’avais aussi beaucoup aimé Real Humans) alors cette fois sera peut-être la bonne.

  7. Ian Mc Ewan est un auteur que j’aime beaucoup et dont j’ai aimé tous les livres que j’ai lus, celui-ci y compris ! Et pour revenir sur les commentaires, personnellement, je garde un excellent souvenir de Sur la plage de Chesil.

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