« Les Bordes » est le deuxième roman d’Aurélie Jeannin après « Préférer l’Hiver ».
Brune, juge d’instruction qui travaille actuellement sur une affaire très dure – une secte vient d’être démantelée et vingt-neuf enfants maltraités y ont été découverts – va passer un week-end aux Bordes, la demeure de sa belle-famille. La jeune femme redoute ce séjour auprès de ses beaux-parents qui lui sont hostiles. Elle est également très angoissée à l’idée qu’il arrive quelque chose à ses deux enfants, Hilde, 8 ans, et Garnier, 4 ans, mais aussi épuisée par le fait qu’ils la sollicitent en permanence et qu’ils ne s’entendent pas, Hilde ne supportant pas son cadet et se montrant souvent tyrannique à son égard.
On sent la tension qui monte dans ce huis clos où Brune est renvoyée à des souvenirs douloureux et ne se sent pas à sa place. L’autrice a vraiment réussi à créer une ambiance lourde, pesante : quelque chose de terrible va se produire…mais quoi ?
« Les Bordes » nous raconte ce week-end, en le découpant heure par heure, ce décompte accentuant la tension. J’ai trouvé qu’Aurélie Jeannin excellait à nous entraîner dans la tête de Brune, à la fois dévorée par l’amour intense qu’elle éprouve pour ses enfants, et poussée à bout par le manque de sommeil, les contraintes, les horaires à respecter, les demandes incessantes, et le caractère parfois compliqué de ses enfants. La personnalité de la petite Hilde, la relation difficile entre le frère et la sœur sont également très bien rendues.
En revanche, j’ai regretté que deux axes n’aient pas été plus développés : le dossier sur lequel travaille Brune, qui revient comme un leitmotiv, et le handicap de la jeune femme, qui souffre de prosopagnosie ( elle ne reconnait pas les visages) – c’est la première fois que je rencontre ce sujet en littérature, et j’ai trouvé dommage qu’il ne soit qu’évoqué car c’est un angle qui aurait pu être vraiment original.
La fin arrive brutalement et ne m’a pas totalement convaincue, j’ai eu du mal à la trouver crédible : je m’attendais soit à quelque chose de plus doux, plus lumineux, soit à une conclusion plus explosive. Un final qui me laisse donc un goût de déception mais qui n’enlève rien au talent d’écriture d’Aurélie Jeannin, vraiment douée pour exprimer les sentiments, les émotions, et pour créer une ambiance sombre et particulière dans ses romans.
Publié en Janvier 2021 chez HarperCollins France, 224 pages.
16e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2021.