Après mon gros coup de cœur de 2015 pour « L’idée ridicule de ne plus jamais te revoir » de Rosa Montero, je n’avais plus relu l’autrice espagnole…jusqu’à son nouvel opus, « La Bonne Chance ».
On y fait la connaissance de Pablo, architecte madrilène reconnu, qui prend le train pour se rendre à une conférence. Sur le trajet, à un arrêt dans une toute petite ville, il regarde distraitement par la fenêtre, et voit un panneau « à vendre » à une fenêtre d’un immeuble lépreux en face de la gare. Sur un coup de tête, et sans prévenir personne, il ne va pas à la conférence, mais retourne dans la petite ville et achète l’appartement. Alors qu’il s’y installe, dans des conditions rudimentaires, il fait la connaissance de sa voisine Raluca, une jeune femme énergique qui le prend sous son aile…
J’ai trouvé le premier chapitre très réussi et très intrigant. Après ce début en fanfare, le roman trouve son rythme et je me suis sentie bien dans ce livre accessible, fluide et plaisant, autour de deux personnages attachants, Pablo et Raluca. Je ne m’attendais pas à lire une histoire d’amour à la Pretty Woman, entre deux personnes que tout oppose, qui viennent de milieux très différents et se rencontrent par hasard, mais Rosa Montero n’est pas le genre d’autrice à se cantonner à un seul genre, donc pourquoi pas le feel good, surtout quand il est de qualité?
Cependant, j’aurais préféré qu’elle assume jusqu’au bout la romance et les bons sentiments plutôt que de vouloir raccrocher à tout prix l’histoire à quelque chose de trop gros pour l’ambition donnée à ce livre, ce qui lui donne un côté artificiel : il y a des dizaines de raisons qui peuvent pousser une personne à tout lâcher pour changer brusquement de vie, et Rosa Montero a choisi de l’expliquer par une culpabilité liée à un acte horrible… Mais cet événement, ces sentiments, ne sont pas assez creusés, traités en profondeur, pour être vraiment crédibles, ils sont beaucoup trop sombres par rapport à la tonalité du livre, et tout ce qui y est lié -l’enquête policière, les personnages secondaires – vient affaiblir l’histoire au lieu de la renforcer.
J’ai eu l’impression que l’autrice était écartelée, qu’elle n’arrivait pas à choisir entre un roman tendre et positif, et un drame. « La Bonne Chance » est donc un livre agréable, lu avec plaisir, mais je l’ai trouvé bancal, et en-deçà de ce qu’aurait pu proposer Rosa Montero, vu son grand talent de conteuse.
Publié en Septembre 2021 chez Métailié, traduit par Myriam Chirousse, 300 pages.