2018 n’aura pas été une bonne année pour la littérature israélienne, avec le décès de deux de ses auteurs phare : Aharon Appelfeld en Janvier et Amos Oz en Décembre. Valérie Zenatti, auteure de nombreux romans adultes et jeunesse (dont le très beau « Une bouteille dans la mer de Gaza ») était la traductrice d’Aharon Appelfeld, à qui elle consacre « Dans le faisceau des vivants ».
« Dans le faisceau des vivants » est un livre court – 160 pages – et pourtant tellement riche. C’est le genre de livre dont on a envie de souligner des pages entières, de garder en mémoire des passages. Valérie Zenatti nous raconte une rencontre professionnelle, entre un auteur et sa traductrice, mais aussi ô combien personnelle. Son histoire et celle d’Aharon Appelfeld sont entremêlées, malgré leur différence d’âge et de vécu : tous deux sont arrivés en Israël au même âge, treize ans, et ont dû apprendre une nouvelle langue, l’Hébreu. Celle-ci sera la langue du renouveau pour Aharon Appelfeld, qui lui permettra de mettre des mots sur son passé tragique. Les thèmes mentionnés dans ce récit sont nombreux: relation entre un auteur et son traducteur, différence entre l’écriture et la traduction, rapport à la langue , navigation entre deux langues, écrire (ou pas) sur la Shoah…
Valérie Zenatti évoque également le parcours d’Aharon Appelfeld et donne des clés pour mieux comprendre son oeuvre, fortement impactée par ce qu’il a vécu dans son enfance. Né Erwin Appelfled en 1932 à Czernowitz, alors en Roumanie, il a perdu sa mère, assassinée lorsqu’il avait huit ans. Deux ans plus tard, il est déporté avec son père dans un camp en Ukraine mais parvient à s’enfuir et va se cacher pendant des mois dans la forêt et chez des paysans avant d’être recueilli par l’Armée Rouge puis d’embarquer une fois la guerre finie pour la Palestine. Ce n’est qu’en 1957 qu’il retrouvera son père.
C’est beau, profond, touchant car on sent l’attachement de Valérie Zenatti pour l’auteur, l’importance qu’il avait dans sa vie. Elle ira jusqu’à Czernowitz, aujourd’hui en Ukraine, qui fut l’une des villes fleurons du Yiddishland, et où désormais il ne reste presque plus rien de la présence juive. C’est un livre qui donne envie de découvrir ou de redécouvrir l’oeuvre d’Aharon Appelfeld (j’avoue que je n’ai lu que deux de ses romans, « Tsili » il y a longtemps que j’avais aimé mais que j’avais trouvé assez perturbant, et « Les Partisans » un livre auquel je n’avais pas vraiment accroché. )
Une très belle lecture, un livre qui mérite vraiment d’être découvert, voire même d’être relu !
Publié en Janvier 2019 aux éditions de l’Olivier, 160 pages.
14e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2019
Cet hommage de Valérie Zenatti semble passionnant.
il l’est !
Un livre que je veux lire pour une double raison : les deux romanciers en jeu!
oui, il y a du niveau !
« On ne peut écrire sur des grandes catastrophes avec des mots trop grands. », c’est tellement vrai ! Il faudra que je lise cet hommage.
les verbatim d’Aharon Appelfeld reproduits par Valérie Zenatti sont extrêmement profonds en effet…
N’ayant jamais lu Aharon Appelfeld, j’hésite alors que j’aime beaucoup les livres de Valérie Zenatti .Crois-tu que c’est jouable quand même ?
oui, moi-même je n’en avais lu que deux, et sans forcément beaucoup accrocher…on n’a pas besoin de connaître Appelfeld et son oeuvre pour apprécier ce livre… si en plus tu aimes Valérie Zenatti, fonce !
Ce livre me fait de l’oeil, j’adore Valérie Zenatti et je serai curieuse de la lire dans ce registre.
si tu adores Valérie Zenatti, ce livre est pour toi !
J’ai l’impression que c’est un texte trop intime pour moi. A voir…
ah non je ne pense pas !