L’Enfant Perdue – Elena Ferrante

S’il y a bien un roman incontournable pour moi dans cette Rentrée Littéraire de Janvier , c’est « L’Enfant Perdue » d’Elena Ferrante, le tome 4 de « L’Amie Prodigieuse ». Tous les romans de l’auteure italienne sont chroniqués sur le blog, et j’ai adoré les trois premiers volumes de cette série qui raconte l’amitié de Lila et Elena sur une soixante années à Naples. D’ailleurs, petite fierté, nous avions parlé du premier tome dans le Bibliomaniacs de Mai 2015bien avant son énorme succès populaire! (merci Coralie!)

Alors, qu’en est-il de ce quatrième – et dernier – tome? Celui-ci commence là où le troisième tome s’arrêtait : Elena a quitté son mari Pietro, avec qui elle a deux filles, pour son grand amour de jeunesse Nino, au grand dam de tout son entourage – et de quasiment toutes les lectrices, qui ont une piètre opinion de Nino et  se demandent pourquoi la sage et intelligente Elena s’embarque dans cette galère!

Et ce début laisse présager la couleur de ce dernier opus : si nous avons assisté pendant trois romans à la lutte d’Elena et Lila pour obtenir, ce quatrième tome reflète leur lutte pour ne pas perdre. Car les deux femmes vont en vivre, des écueils, des échecs, des pertes, des décès…Et le contexte géo-politique est à l’avenant : les années de plomb s’éloignent, les anciens insurgés retournent leur veste et la corruption et la drogue font des ravages.

Le quartier est toujours extrêmement présent dans la vie des deux femmes : contrairement à Lila, Elena l’avait quitté physiquement, mais n’avait jamais vraiment réussi à se construire une vie indépendante de lui. Dans ce quatrième tome, elle revient s’y installer : les lieux sont de nouveau ceux du début de l’histoire. Quant aux personnages, à part Pietro et la jeune génération, ce sont également ceux que l’on pouvait croiser dans le premier tome, juste un peu plus vieux. Elena et Lila, qui avaient vécu un certain nombre d’années éloignées l’une de l’autre – dans le troisième tome, leur relation était essentiellement téléphonique –  se retrouvent de nouveau à vivre côte à côte, réunies physiquement mais aussi par la maternité. Et Lila montre une facette inconnue, celle d’une mère de substitution attentive et diplomate.

Ce quatrième tome est moins plaisant que les trois premiers, parce qu’il est plus grave, plus triste que les autres et qu’il y a moins d’espoir. Le début du roman est également très centré sur Elena et ses difficultés amoureuses, ce qui rend l’histoire moins vivante. Pour autant, je l’ai dévoré comme les autres, complètement immergée dans le récit, dans Naples, dans le quartier, louant la finesse de l’auteure et son talent immodéré pour décrire les caractères, les sentiments, et comme d’habitude j’ai complètement adhéré à ce que l’auteure proposait…sauf pour un événement (très marquant) auquel j’ai eu du mal à croire. Je l’ai trouvé trop gros pour être si vite expédié, il aurait presque nécessité un roman à lui tout seul, et c’est vraiment le seul élément qui m’a fait réellement tiquer en l’espace de quatre volumes.

Si ce dernier tome m’a un peu moins plu que les trois premiers – parce qu’il est plus dur, plus triste, parce qu’aussi il couvre une période beaucoup plus longue de la vie de Lila et Elena, environ trente ans en un seul volume, et non dix ou quinze ans pour les autres – il n’en reste pas moins que cette tétralogie est absolument géniale, et reste un coup de cœur dans sa globalité. Une histoire d’amitié complexe sur plus de soixante ans, deux magnifiques portraits de femme écrits avec une grande finesse psychologique, mais aussi une grande fresque de l’Italie de la deuxième moitié du XXe siècle vu à travers un quartier populaire de Naples : une réussite à découvrir absolument si ce n’est déjà fait!

Publié en Février 2018 chez Gallimard, traduit par Elsa Damien, 560 pages.

11e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2018.

14 commentaires sur “L’Enfant Perdue – Elena Ferrante

  1. Je suis complètement d’accord avec tout ce que tu dis, Eva ! (Y compris sur ce que tu dis du fameux événement très marquant auquel tu fais allusion, même si je ne me l’étais pas formulé comme tu le fais). Quoi qu’il en soit, on est tristes de quitter définitivement Lila et Lenù !

    1. moi j’ai un faible pour le premier car ça a vraiment été une magnifique découverte…et inattendue car à l’époque on ne parlait pas du tout de cette série dans les médias, la parution s’était faite très discrètement. Mais c’est vrai que le 3e est très riche

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