Pour une cinquième participation au Mois Américain 2019, j’ai choisi un récit autobiographique, « Je sais pourquoi chante l’oiseau en cage » de Maya Angelou.
Cet ouvrage est le premier tome d’une série de sept récits autobiographiques de l’auteure afro-américaine, née en 1928, intellectuelle, féministe, et défenseuse des droits civils. Il commence par l’arrivée de Maya (de son véritable prénom Marguerite) et de son frère Bailey chez leur grand-mère en Arkansas, suite à la séparation de leurs parents, lorsque la petite fille a trois ans, et se termine alors qu’elle en a dix-sept.
Ce livre, qui n’est pas un essai mais un recueil de souvenirs, peut être vu comme un récit initiatique, un récit d’apprentissage. Maya Angelou raconte des événements qui ont marqué sa vie, certains drôles, d’autres importants, d’autres très graves, comme son viol à l’âge de huit ans, par le compagnon de sa mère, avec la période de mutisme qui s’en est suivie, et la culpabilité qu’elle a éprouvée.
Dès son plus jeune âge, Maya va être en contact avec des personnes non conventionnelles, notamment deux femmes fortes et pourtant très différentes l’une de l’autre: sa grand-mère paternelle et sa mère, qui lui ont toutes deux montré le chemin pour être une femme libre et indépendante. Elle va également avoir accès aux livres et à l’éducation, à une période où cela était rare, et encore plus lorsqu’on était une femme noire.
Sa grand-mère est une femme très religieuse qui, bien qu’elle soit noire dans l’Arkansas, a réussi à devenir patronne d’une épicerie et propriétaire de terrains sur lesquels habitent des Blancs. La mère de Maya est bien différente : elle vient d’une famille de mafieux et ne se préoccupe pas des conventions et du qu’en-dira-t-on, que ce soit sur le plan personnel comme sur le plan professionnel. Si elle n’est pas très impliquée dans l’éducation de sa fille, elle lui apporte son soutien dans ses choix de vie, notamment quand Maya souhaite devenir contrôleuse dans les tramways, un poste qui était à l’époque interdit aux Noirs.
Toutes les vignettes n’ont pas éveillé mon intérêt de la même manière mais j’ai vraiment beaucoup aimé ce récit, très fluide, très accessible (malgré certaines expressions et tournures de phrases que j’ai trouvées un peu bizarres, mais qui reflètent bien la version originale – j’ai en effet commencé le livre en anglais) et basé sur un personnage attachant, intelligent déterminé et plein d’énergie. J’ai été surprise à de nombreuses reprises en lisant ce livre : je pensais notamment que puisque l’enfance de l’auteure se déroule durant la ségrégation raciale, les rapports entre Noirs et Blancs seraient la pierre angulaire de ce livre. Mais finalement, à part certains événements marquants (les enfants blancs dans l’épicerie qui tentent d’humilier la grand-mère, le dentiste blanc qui refuse de soigner Maya car elle est noire, le premier emploi), les Noirs et les Blancs vivent tellement séparés que les Blancs sont à peine réels pour la petite fille, et la majorité des vignettes se déroule dans un monde presque exclusivement noir. Je ne pensais pas non plus qu’une petite fille noire née aux Etats-Unis dans les années 20 pourrait avoir l’opportunité de faire des études (dans les derniers chapitres du récit, Maya est au lycée) ou de voyager (elle fait un court séjour au Mexique avec son père).
« Je sais pourquoi chante l’oiseau en cage » est un récit surprenant, un très beau portrait de femme en devenir, qui donne envie de lire les tomes suivants pour en savoir plus sur la vie de Maya Angelou.
Disponible au Livre de Poche, traduit par Christiane Besse, 352 pages.
Retrouvez ce livre à l’affiche de l’émission de Septembre 2019 du podcast littéraire Bibliomaniacs ici.
oh cela semble etre tout un livre…ouiii a noter
oui, vraiment un livre à ne pas rater !
« Je ne pensais pas non plus qu’une petite fille noire née aux Etats-Unis dans les années 20 pourrait avoir l’opportunité de faire des études »
La ségrégation ne signifie pas que les noirs n’allaient pas à l’école, juste qu’il existait des établissements pour blancs et d’autres pour noirs. Dans l’enseignement supérieur, le premier établissement pour noirs date de 1837.
merci pour cette information que j’ignorais!
En fait Maya vit à San Francisco lorsqu’elle est adolescente donc elle va dans un lycée ouvert à tous. Ce que je voulais dire, c’est que pour les gens nés dans les années 20 – et a fortiori aux Etats-Unis – aller au lycée devait être très rare, et d’autant plus si on était une fille, noire, et de milieu modeste.