Philip Roth est un auteur que je lis depuis près de vingt-ans (oui, pour ceux qui me connaissent, j’ai commencé à lire du Philip Roth à dix ans…no comment), mais je n’avais pas encore pris le temps de lire « Némésis », tout comme « Indignation », alors que le résumé me faisait baver d’envie.
J’associe souvent Philip Roth à Woody Allen, car tout comme lui, il a longtemps produit des œuvres très distinctives pour maintenant publier des livres toujours aussi bien écrits, mais qui ne présentent plus forcément des critères aussi marqués, notamment sur le plan de la provocation et de la sexualité. D’ailleurs, pour les lecteurs qui n’auraient jamais encore lu des romans de Philip Roth, celui-ci n’est pas vraiment représentatif de l’oeuvre de cet écrivain.
« Nemesis » comme la plupart des livres de Philip Roth se passe dans la communauté juive de la ville de Newark, avec la majorité des personnages ayant l’âge qu’avait Philip Roth, né en 1933, à cette époque. En effet, nous sommes à l’été 1944, et Bucky Cantor, le directeur du terrain de jeu, s’occupe d’enfants d’une dizaine d’années. Bucky n’a pas été incorporé car il souffre d’une très mauvaise vue, mais c’est un jeune homme de vingt-trois ans en pleine santé, et au corps d’athlète. Il possède également un grand sens du devoir. Cet été 1944 est très chaud, et bientôt des cas de polio se déclarent. Bucky, dont les deux meilleurs amis sont en train de se battre contre les Nazis, doit faire face à la mort de deux de ses élèves et à l’infirmité de dizaine d’autres. Lorsque sa petite amie Marcia lui propose de la rejoindre comme moniteur dans un camp de vacances, au grand air pur et loin du foyer infectieux, il n’hésite pas longtemps. Mais les choses ne vont pas se passer comme prévu pour le pauvre Bucky…
Un vaccin ayant été développé en 1955, la peur panique de la polio a disparu depuis, et la génération à laquelle j’appartiens est peu familiarisée avec cette maladie aux conséquences abominables.
Philip Roth traduit très bien l’impuissance d’une communauté qui ne sait pas comment la maladie se transmet, comment l’éviter, et qui ne peut que constater ses ravages, et ses impacts aléatoires sur les enfants: tout peut rentrer dans l’ordre en quelques semaines, ou bien provoquer de très sérieuses infirmités, voire la mort, qu’elle soit lente ou rapide. L’inconnu est donc partout, et laisse la part belle aux rumeurs et à la culpabilité.
Car c’est un conte bien cruel que nous livre Philip Roth: une déchéance physique, sociale, familiale. Il y a d’ailleurs une réflexion intéressante sur l’ironie du sort, le rôle de Dieu, la culpabilité et la résilience. « Némésis » est une sorte de fable talmudique, et Bucky Cantor une sorte de Larry Gopnik dans « A serious man » des frères Coen. »Némésis » est un roman court, de facture plus accessible et classique que la plupart des livres de Philip Roth, mais qui appelle à la réflexion. Une belle réussite littéraire.
J'ai découvert Roth avec ce titre et j'ai adoré : http://litterature-a-blog.blogspot.fr/2012/11/nemesis-de-philip-roth-rentree.html
ton billet est extrêmement intéressant, merci pour le lien!
tu as lu d'autres Roth depuis?
Non je n'en ai pas lu d'autres depuis.
C'est un auteur avec lequel j'ai beaucoup de mal. Je n'ai aimé qu'un tire, le plus connu mais les très récents que je trouve trop noirs et les très anciens ne me conviennent pas.
j'ai vu sur ton blog que tu avais lu Portnoy et son complexe, qui est très spécial, Everyman et The Plot against America…celui-ci est assez sombre, mais quand même très différent de son oeuvre habituelle, peut-être qu'il t'accrocherait plus que ceux que tu as déjà lus.
Nous avons décidément beaucoup de goûts communs ! C'est le premier Philip Roth que j'ai lu, et je l'ai trouvé excellent.
tu en as lu d'autres depuis?
J'ai lu Le Complot contre l'Amérique, que j'ai trouvé intéressant, mais un peu longuet par moments.