« Gouverneurs de la Rosée » de Jacques Roumain est un roman haïtien très connu, voire même culte, mais dont je n’avais jamais entendu parler jusqu’à ce que Coralie le propose pour l’affiche de Juin de Bibliomaniacs, spéciale « Chaleur ». (Le podcast sera en ligne dans quelques jours).
« Gouverneurs de la Rosée » est l’histoire d’un retour, celui de Manuel, un jeune homme haïtien qui avait émigré à Cuba afin de travailler comme ouvrier agricole dans une plantation sucrière. Après de nombreuses années d’absence, il revient dans son village, pour découvrir une situation catastrophique. La pluie n’est pas tombée depuis des lustres, ce qui fait que l’agriculture est au plus mal et que les habitants du village vivent très difficilement. Résignés, ils souffrent ou envisagent de partir, au lieu de chercher une solution locale. Il est difficile pour eux de s’organiser car une brouille suite à une sombre affaire d’héritage a divisé le village en deux clans ennemis. Manuel décide alors de chercher une source qui pourrait alimenter le village, et de résoudre ainsi les deux problèmes du village : la sécheresse et la division.
Il est dépaysant de lire « Gouverneurs de la Rosée » car le style est très particulier, ainsi que le phrasé et le vocabulaire utilisés. Cela nous plonge directement dans ce petit village haïtien ravagé par la sécheresse et la discorde. Il y a deux axes dans ce roman, l’histoire du plan de Manuel mais aussi son histoire d’amour avec la jolie Annaïse. Quelque soit l’axe, c’est la pureté des actions de Manuel et de ses sentiments qui se dégage du texte. Manuel, c’est l’homme parfait au cœur pur : bon fils, bon amoureux, bon camarade, il pense d’abord aux autres avant de penser à lui et préfère se sacrifier pour le bien collectif. Difficile de ne pas penser à Jésus en lisant ce roman!
Manuel, qui a passé beaucoup de temps à l’étranger dans un pays, Cuba, beaucoup plus avancé au niveau agricole, et qui, 15 ans avant la révolution et la prise de pouvoir de Fidel Castro – le livre a été écrit en 1944 – est déjà en proie à l’influence communiste, ne comprend pas pourquoi les habitants s’enferment dans leur querelle et dans leur passivité, au lieu de s’entraider et de trouver ensemble une solution à leur problème commun. Jacques Roumain, l’auteur, est en effet le fondateur du parti communiste à Haïti, et son roman propose un fort message politique, en conformité avec son engagement.
Ce livre est chatoyant, avec un style dynamique et une histoire très bien construite. J’ai vraiment apprécié « Gouverneurs de la Rosée », mais j’ai eu du mal à me détacher du message politique qu’il porte, ayant des difficultés à voir au-delà de la parabole. Peut-être suis-je aussi trop cynique pour trouver totalement crédible la complète pureté de Manuel ? Ces deux raisons ont sans doute tempéré mon enthousiasme : j’ai beaucoup aimé ce roman de Jacques Roumain, un classique de la littérature haïtienne, mais sans que ce soit un coup de cœur.
Publié en Novembre 2013 chez Zulma, 216 pages.
Je ne connaissais pas du tout… Il faut dire que je ne connais pas la littérature haïtienne. Mais bon, tu dis que ce n’est pas un coup de coeur…
je ne connaissais pas du tout non plus la littérature haïtienne mais j’ai bien envie d’enchaîner avec le roman de Louis-Philippe Dalembert « Avant que les ombres s’effacent »…
Il est sur ma PAL depuis un petit moment, je devrais me décider à le lire :o)
oui c’est ce que tu me disais sur IG 🙂
Je passe mon chemin ! la pureté d’un homme .. et derrière un auteur fondateur du parti communiste .. comme toi j’ai un regard un peu cynique .. je me souviens encore de ce reportage récent sur les rafles de Septembre à Cuba…
oui je l’ai trouvé un peu trop idéologique à mon goût…mais un style, une histoire, une atmosphère, vraiment très intéressants
Je l’aime beaucoup et je l’offre souvent !
toujours sympa d’offrir un livre qu’on a beaucoup aimé pour le faire diffuser!
C’est un livre éminemment politique, on est d’accord. Mais je suis tombé sans restriction sous le charme de cette langue chatoyante et de ce message du naïveté salutaire je trouve.
c’est vrai que cette pureté fait du bien…mais j’ai du mal à y croire 🙂
J’avais beaucoup aimé aussi, même si le côté poétique m’a parfois ennuyée. J’ai adoré le Dalembert, mais je ne dis rien puisque nous n’avons pas les mêmes goûts pour toi.
j’ai vu Louis-Philippe Dalembert hier soir, car il a reçu le Prix Orange, et j’ai vraiment très très envie de lire ce livre, au sujet original et méconnu
Pardon, pour tout.
oui je trouvais ta phrase bizarre, du coup ^^