Les guerres de mon père – Colombe Schneck

La semaine dernière j’ai assisté à la présentation de la Rentrée Littéraire de Janvier de Stock où un certain nombre d’auteurs ont parlé de leur nouveau livre, dont Colombe Schneck. L’auteure, après avoir abordé le côté maternel de sa famille dans « La Réparation », s’intéresse à l’histoire de son père, Gilbert Schneck, dans « Les guerres de mon père ».

Voilà un livre que j’ai vraiment beaucoup aimé. Je l’ai trouvé très riche, il aborde en effet de nombreuses thématiques. Colombe Schneck a perdu son père il y a vingt-cinq ans, celui-ci est mort assez jeune d’un problème cardiaque. Un père qu’elle décrit comme toujours positif, charmant, séducteur, dont le leitmotiv était « on ne parle pas des choses qui fâchent ». Pourtant cet homme a vécu plusieurs traumatismes : deux guerres – la Seconde Guerre Mondiale durant laquelle ses parents et lui ont dû se cacher car ils étaient juifs, et la guerre d’Algérie, où il était médecin, notamment en charge de remettre d’aplomb les personnes torturées par l’armée française. Mais aussi l’assassinat de son père, Max Schneck, en 1949, qui avait fait les choux gras de la presse à scandale, la rumeur disant qu’il avait été découpé par son amant et caché dans une valise! (Un sujet que Colombe Schneck explorera en 2006 dans « L’increvable Monsieur Schneck »)

L’auteure enquête sur la vie de son père. Elle retrouve aux Archives Nationales les dossiers des préfets (Labarthe, Rivière, Popineau) qui ont fait traquer Gilbert et ses parents, qui ont organisé des rafles, des déportations…des préfets qui soit ne seront pas inquiétés, soit retrouveront bien vite leurs privilèges. Mais si son père et ses grands-parents ont survécu à la guerre, c’est aussi grâce au courage et à la générosité d’inconnus : Thérèse Moreau et son fils, Joseph Garreau ou encore Charles Schmitt, à qui Colombe Schneck rend hommage.

Le Bien et le Mal, la liberté de l’individu contre le groupe, une thématique que l’on retrouve pendant la guerre d’Algérie, où Gilbert est confronté aux pires horreurs et où il participera – sans torturer lui-même – aux exactions commises par l’armée française.

Colombe Schneck retrouve également des amis de son père, discute avec son oncle maternel – qui était son meilleur ami – mais rencontre aussi d’anciennes maîtresses de son père, qui était un homme à femmes. Cette enquête lui permet de prendre du recul par rapport à son père. Oui Gilbert Schneck était un père merveilleux, qui éprouvait pour elle un amour illimité. Mais il était aussi un homme infidèle, qui faisait souffrir sa femme et ses maîtresses, qui se comportait parfois mal, qui gâtait outrageusement sa fille, qui n’avait pas toujours raison. Cette enquête lui permet en quelque sorte de faire le deuil de son père, et d’avancer dans la vie, notamment dans sa vie amoureuse.

« J’aurai bientôt l’âge de mon père, je le regarde avec amour et tendresse, nous sommes presque égaux aujourd’hui. Je pourrais lui dire, je t’aime et je ne suis pas toujours d’accord avec toi. D’une certaine manière, je suis plus libre qu’il ne l’était. »

« Les guerres de mon père » est un livre ancré dans les tourments du XXe siècle, une enquête émouvante et passionnante d’une fille sur son père, qui explore les tréfonds de l’Histoire et se réconcilie avec elle-même. Un magnifique portrait d’homme à la fois sublimé et faillible, mais aussi le plaisir de retrouver Colombe Schneck et son écriture qui a gagné ici en maturité et profondeur.

Publié en Janvier 2018 chez Stock, 306 pages.

4e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2018.

17 commentaires sur “Les guerres de mon père – Colombe Schneck

  1. J’ai lu La Réparation et j’en ai gardé très peu de souvenirs, ce qui m’étonne un peu. Je l’ai vue à la LGL et j’ai très envie de lire celui-ci.
    En plus tu as aimé ! J’attendrai qu’il soit dispo à la BM pour le lire. Il me parle personnellement 😉

    1. dans « La Réparation », je me souviens de l’histoire des cousines de sa mère, et aussi du fait que l’auteure répétait souvent qu’elle ne se sentait pas légitime pour parler de la Shoah, qu’elle était trop bourge, trop superficielle pour s’attaquer à un tel sujet…
      Les guerres de mon père est vraiment riche : 2nde GM, guerre d’Algérie, relation père-fille, fait divers, impact de la personnalité de son père sur sa propre vie notamment amoureuse…il y en a pour tous les goûts!

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