« L’été circulaire » est un roman de Marion Brunet que j’ai découvert à l’occasion du Prix Polar SNCF 2020, puisqu’il fait partie des 7 poches sélectionnés.
L’histoire nous entraîne dans une famille a priori banale du Sud de la France. Manuel et Séverine sont les parents de deux adolescentes, Céline, seize ans, et Johanna, quinze ans. L’aînée est une très jolie fille qui plait beaucoup aux garçons, la cadette est plus sauvage, plus cérébrale, avec un physique un peu étrange – elle a notamment les yeux vairons. Alors que l’été approche, à l’occasion de la fête foraine annuelle, la famille découvre la grossesse de Céline, trop avancée pour songer à un avortement… L’adolescente refuse de dire qui est le père. Manuel, un homme colérique et bas du front, est perturbé par la situation et se met en tête que Saïd, leur voisin de dix-huit ans qu’ils connaissent depuis toujours, y est peut-être pour quelque chose… La tension monte, la haine aussi, d’autant plus que Manuel, qui se livre à un trafic d’antiquités avec le jeune homme, a l’impression que Saïd l’arnaque et s’enrichit sur son dos…
Cette tension est d’autant plus réussie que les personnages et les situations n’ont rien de vraiment particulier : les parents sont un couple comme il y en a tant, qui vit chichement dans une petite maison d’un village du Sud et qui n’a pas vraiment de perspectives mais qui s’en accommode, qui profite de l’été pour prendre l’apéro avec les voisins, qui n’est ni très proche ni en guerre avec ses enfants…l’écriture de Marion Brunet est sans fioriture mais a quand même un pouvoir hautement évocateur et il y a quelque chose de très cinématographique dans les scènes décrites, dans les sensations : la chaleur, l’ennui, la liberté de l’été où les filles peuvent vagabonder sans que leurs parents ne sachent où elles sont, leur complicité et leur entraide malgré leurs différences de caractère. Il y a également une dimension psychologique très maîtrisée, avec notamment Manuel, que l’état de sa fille renvoie à sa frustration d’avoir été le fils d’immigré, l’ouvrier du bâtiment, qui a engrossé la fille du gros fermier local, et qui doit réparer sa faute en l’épousant, sans être pleinement considéré dans la famille près de vingt ans après.
J’ai particulièrement apprécié le personnage de Johanna (Jo), qui a un petit côté « L’Effrontée ». C’est la seule de sa famille qui a des envies d’ailleurs, qui aime le théâtre et qui a la curiosité d’aller à quelques kilomètres de là, voir une pièce au Festival d’Avignon où elle va rencontrer une fille de son âge qui vient d’un milieu privilégié…La scène de la fête au milieu des petits bourges est d’ailleurs extrêmement réussie.
« L’Ete Circulaire » de Marion Brunet n’est pas un polar ou un thriller à proprement parler…c’est un roman noir avec une dimension psychologique, une tranche de vie de quelques mois estivaux où un événement affreux va se produire…un livre que j’ai trouvé très maîtrisé, très bien dosé. C’est la première fois que je lis un ouvrage de cette auteure française, et ce ne sera certainement pas le dernier!
Publié en 2018 chez Albin Michel, disponible au Livre de Poche, 272 pages.
très tentée, ton enthousiasme est communicatif et je n’ai jamais lu cette autrice.
je ne peux que te le conseiller, il est court et efficace !
J’ai lu dans le désordre de Marion Brunet qui a été un énorme coup de foudre, j’ai hâte de lire celui ci pour re-découvrir sa plume!
https://reverenattache.wordpress.com/
L’Eté Circulaire et Vanda sont mes préférés de l’autrice !