« Aux vagabonds l’immensité » (quel beau titre!) de Pierre Hanot nous entraîne à Metz en Juillet 1961. Dans cette ville à forte tradition militaire ont été rapatriés plus d’un millier de parachutistes suite au putsch avorté d’Alger, trois mois plus tôt…en parallèle, le FLN et son concurrent, le MNA, s’organisent. La tension monte dans la ville, jusqu’au 23 Juillet : dans une boite de nuit de Montigny-les-Metz , une bagarre éclate entre parachutistes et maghrébins. Un membre du FLN ouvre le feu et tue le barman et deux militaires. Les parachutistes organisent une riposte durant la nuit, que l’on appellera plus tard « La nuit des paras »: toute personne croisée qui semble être maghrébine sera frappée voire jetée dans la Moselle, et un marchand ambulant sera abattu.
Pierre Hanot a choisi la forme du roman choral pour évoquer cet épisode dont j’avais entendu parler puisque je suis née à Metz, mais qui, je pense, est peu connu de la plupart des lecteurs. On suit donc une multitude de personnages : deux amoureux, Christiane et Idir ; un membre du FLN, Hocine ; un jeune marchand ambulant, Nourredine ; un instituteur syndiqué, Marcel ; deux copains parachutistes, Michel et Francis; Jean-Marie, le barman de la boite ; Richard, un journaliste…
L’avantage du roman choral, c’est qu’il permet de donner une vision globale de cet événement en le racontant via une multitude de points de vue – et d’ailleurs, sans manichéisme aucun de la part de Pierre Hanot. L’inconvénient, c’est qu’il y a beaucoup de personnages, qu’il est compliqué de donner une incarnation suffisante à tous, et que cela peut donner un aspect artificiel au roman. Si j’ai trouvé le livre très intéressant sur le plan historique, et que j’ai aimé en savoir plus sur ma ville natale (j’ignorais par exemple que le Pontiffroy était dans les années 60 un quartier populaire habité principalement par des immigrés, alors que pour moi c’est un quartier moderne où je me rendais à la Médiathèque), il a manqué quelque chose à ma lecture pour pleinement l’apprécier et être vraiment embarquée par le récit, j’ai trouvé l’ensemble un peu plat, sans souffle romanesque suffisant.
Une impression mitigée mais un roman qui a le mérite de mettre en lumière un événement historique peu connu.
Publié en Mai 2020 aux éditions de la Manufacture de Livre, 224 pages.
Pierre Hanot est un artiste engagé, bien connu à Metz comme guitariste et chanteur. Suite à ses nombreux concerts dans les prisons, il a écrit, il y a une quinzaine d’années, un premier livre : « Rock’n taules ». ( Il trouve de bons titres ! )
Il rappelle ce sanglant épisode de la » Nuit des Paras » qui, tu as raison, est très peu connu des Lorrains : un peu occulté ?… Un peu oublié en raison du retentissement des massacres parisiens
d’octobre 1961, puis de février 1962 au métro Charonne ?…
Mais depuis 4 ans, une fondation messine, le « Collectif 61 », a engagé un travail de mémoire pour honorer toutes les victimes de cette tragédie.
Je ne connaissais ni cet événement horrible ni le livre. C’est la première fois que j’en entends parler, merci pour la découverte !
quand on n’est pas lorrain, effectivement, on n’en entend pas parler !