Dans Les Vies de Jacob, tout commence avec la découverte dans un marché aux puces d’un bien curieux album qui regroupe 369 photomatons du même homme entre 1973 et 1974. Christophe Boltanski se lance à la recherche de cet homme mystérieux qui semble avoir eu mille vies, dans beaucoup d’endroits différents, sur une très courte période. Une poignée d’ indices trouvés dans l’album lui permettent d’en savoir plus : un nom étrange, la mention du consulat d’Israël, quelques personnes citées avec leurs adresses respectives, des tenues qui ressemblent à des uniformes …
J’adore ce genre d’enquête et je comprends tout à fait pourquoi Christophe Boltanski a été fasciné par cet album et l’image de cet homme. Il y a d’ailleurs tellement d’événements, de noms, d’endroits, de métiers dans cette histoire que l’on trouverait cela exagéré dans une fiction alors qu’ici tout est vrai.
C’est une trajectoire hors normes que nous conte Christophe Boltanski, celle d’un homme juif après guerre, qui s’est réinventé plusieurs fois, dans plusieurs pays et sous des noms différents, et qui n’est pas sans rappeler le travail de l’oncle de l’auteur, Christian Boltanski, sur l’identité. La dernière partie, inattendue, où l’on découvre un homme qui consacre sa vie à la mort est d’ailleurs particulièrement émouvante.
Un très beau livre, haletant et parfois poignant, qui, même s’il ne concerne pas la famille de Christophe Boltanski, reste dans la lignée des thèmes qu’il a déjà abordés dans de précédents ouvrages – une enquête sur un personnage mystérieux comme dans « Le Guetteur » (sur sa mère), l’exploration d’une histoire familiale, et la mise en lumière d’identités louvoyantes, comme dans « La Cache » (sur sa famille paternelle). A découvrir!
Publié en Août 2021 chez Stock, 234 pages.