Repéré depuis longtemps, mais jamais encore lu ! Il a fallu attendre 2022 pour que je lise l’auteur belge Thomas Gunzig, avec son dernier roman « Le Sang des Bêtes ».
Tom, sorte de double fictionnel de l’auteur, est un gérant d’une boutique de compléments alimentaires pour bodybuilders, qui, en pleine crise de la cinquantaine, a beaucoup de mal à trouver un sens à sa vie. Rien ne le passionne vraiment, ni son métier, ni la musculation, ni sa famille. Son quotidien routinier est bouleversé quand et son fils, séparé de sa petite amie, et son père, veuf et atteint d’un cancer, viennent s’installer chez sa femme et lui. Un jour, Tom repère en face de son magasin une jeune femme maltraitée par un homme plus âgé : il s’interpose et recueille la jeune femme, qui lui tient des propos bien étranges…
Quel plaisir de lecture ! J’ai été tout de suite accrochée par ce récit, aux chapitres portant chacun le nom d’un muscle, que j’ai lu d’une traite. Tom, sous ses airs à la fois cyniques et désemparés, est un personnage touchant et attachant, et le style, simple mais efficace, est au service d’un livre au contenu bien plus riche qu’il n’y parait à première vue. Tom a une histoire familiale lourde : sa mère est morte dans une tragédie, et ses grands-parents paternels, juifs, ont été assassinés pendant la Shoah. Il a hérité de ce traumatisme, et s’est réfugié dans la musculation pour mettre à distance tout ce qui pourrait le désigner physiquement comme juif et donc potentielle victime.
Thomas Gunzig réussit à combiner dans son roman les thèmes de l’héritage familial et du spécisme, en s’interrogeant sur la génétique, l’identité, la mémoire, l’aspect intergénérationnel, les caractéristiques physiques et le rapport au corps, via une intrigue qui frôle parfois la science-fiction tout en restant étonnamment cohérente.
Un livre rythmé, intelligent, frais et émouvant, à découvrir !
Publié en Janvier 2022 au Diable Vauvert, 234 pages.