« Une vie comme les autres » d’Hanya Yanagihara a été annoncé comme un roman événement, et sa sortie a été accompagnée de nombreuses critiques enthousiastes. Pourtant deux choses jouaient à mes yeux en sa défaveur : son nombre de pages – 816, et je ne suis pas une grande adepte des pavés – et sa couverture, que j’ai trouvée absolument hideuse! Cependant, Buchet-Chastel est l’éditeur de Chaïm Potok, qui est l’un de mes auteurs favoris, un argument non négligeable pour que je lise ce roman!
Et au début j’ai eu très peur : j’ai trouvé que le récit mettait beaucoup de temps à se mettre en place, et je n’étais pas sûre de réussir à m’attacher à cette bande de quatre jeunes hommes à New York, Willem, JB, Jude et Malcom, parfait échantillon représentatif, que ce soit au niveau de l’origine ethnique, du milieu social, du secteur professionnel, ou encore de l’orientation sexuelle. Je m’attendais à trente ans d’égos, d’ambitions et de désillusions mais heureusement le récit s’est dirigé dans une autre direction : en effet, l’un des quatre amis se détache du lot. Jude est le personnage le plus mystérieux. Il souffre à la fois physiquement et psychologiquement : un problème aux jambes le handicape et il pratique l’auto-mutilation. Il refuse pourtant d’évoquer avec ses amis les causes de ses tourments voire même de parler de son passé ou de sa famille. Jude, tout comme ses amis, est un personnage que l’on va suivre durant une trentaine d’années : son ascension sociale mais aussi sa lutte permanente contre ses démons…et l’on va découvrir peu à peu les événements traumatisants de son passé.
Difficile de ne pas ressentir de l’empathie pour Jude et j’ai été touchée par plusieurs aspects du roman : une histoire d’adoption tardive, une belle histoire d’amour…l’écriture est fluide, et passé les 200 premières pages j’ai dévoré ce roman. Mais autant j’ai trouvé réussie la partie où Jude est adulte, autant le passé de celui-ci m’a laissée perplexe. Je me suis demandé pourquoi l’auteure avait eu besoin d’accumuler tous ces malheurs. Je sais bien qu’une situation dramatique est souvent le terreau d’autres drames, mais dans une oeuvre de fiction, il faut savoir s’arrêter au bon moment, et là, Jude est frappé par toute la gamme des horreurs qui peuvent arriver à un enfant ou un adolescent. Je réfléchis, mais je n’arrive pas à trouver quelque chose qu’on lui aurait épargné! Surtout qu’en plus, les drames – liés ou pas à son passé- continuent même lorsqu’il est adulte! Pour autant, on n’est pas dans « Les Loyautés » : le livre est bien écrit, les personnages sont bien incarnés, l’intrigue est développée…Mais je pense vraiment que le récit aurait gagné en force si Hanya Yanagihara avait réduit la voilure au niveau des malheurs et si le livre avait compté une centaine de pages en moins.
Je n’ai pas trouvé en « Une vie comme les autres » le chef d’oeuvre bouleversant que l’on m’avait annoncé. Cependant, même si je ne peux pas dire que j’ai lu ce livre avec plaisir, vu toutes les horreurs décrites, c’est un roman bien construit, riche, fluide, qui m’a intéressée. Dommage, vraiment, qu’Hanya Yanagihara ait eu la main lourde sur le pathos car Jude est un personnage porteur, et l’angle de l’amitié masculine est original et bien traité. Un roman qui ne m’a pas enthousiasmée mais qui mérite néanmoins le détour : les cœurs tendres apprécieront, même si – attention – les coeurs trop tendres risquent d’être traumatisés par les horreurs décrites!
Publié en Janvier 2018 chez Buchet-Chaste, traduit par Emmanuelle Ertel, 816 pages.
12e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2018.
.. en même temps avec une couverture pareille, on s’attend à pas mal de souffrance ! au moins ce n’est pas trompeur à ce niveau ahah 🙂
oui, en fait maintenant que j’y réfléchis (grâce à tes lumières :D) je me dis que la couverture est en phase avec le texte, pleine de souffrance, et un peu beaucoup too much 😀
Bonsoir Eva, les 816 pages vont m’attendre pendant un moment, j’en ai tellement d’autres à lire… Et c’est vrai que la couverture n’est pas terrible. Bonne soirée.
Je te suis totalement pour les arguments qui refroidissent la lecture : plus de huit cents pages avec une couverte pareille, je passe mon chemin pour un moment !
Mais visiblement, je ne loupe pas grand chose…
tout dépend de ta sensibilité, je pense…beaucoup de lecteurs ont adoré ce livre!
Il me fait de l’œil depuis sa sortie, je vais finir par craquer !
j’espère que tu ne seras pas 20e sur la liste d’attente 😉
Pas envie de m’enfiler plus de 800 pages vu ce que tu en dis. Tu crois que le gars sur la couv est en train de se faire épiler ? 🙂
sur des zones très très douloureuses alors 😀
J’avais pour ma part beaucoup aimé. Je suis fan de ces romans qui se déroulent sur plusieurs années et de ces atmosphères lourdes… et un peu lentes.
j’aime aussi beaucoup les livres qui suivent des personnages sur plusieurs décennies…là c’est vraiment l’accumulation de malheurs qui m’a gênée, plus que l’atmosphère
Bon, autant de pages, ça attendra ma retraite 🙂
Sinon, je trouve la couverture très vilaine. Je n’y vois pas une souffrance mais un homme qui jouerait au petit enfant à faire du cinéma pour une prétendue douleur. J’ai du mal avec ce choix qui finalement prête à rire voir à se moquer….
mais oui, exactement! je ne comprends pas du tout ce choix, l’expression est complètement outrée et ça en devient ridicule!
voire et non voir….