« Le Train des Enfants » de Viola Ardone nous entraîne à Naples en 1946. Amerigo est un petit garçon malicieux et passionné par les chaussures qui vit dans le dénuement : sa mère, Antonietta, qui est très pauvre, l’élève en effet seule – son père, qu’il n’a jamais connu, est selon elle parti à l’étranger faire fortune.
Antonietta entend parler d’une association communiste qui envoie des enfants nécessiteux dans le Nord de l’Italie, une région économiquement plus développées où ils seront accueillis dans des familles aisées. Amerigo, qui n’a jamais quitté Naples, est confié à une jeune communiste qui a été résistante pendant la guerre, Maddalena Crisculo, et se retrouve dans le train avec tout un groupe d’enfants qui ne veulent pas quitter leurs parents et qui ne savent pas du tout ce qui l’attend dans le Nord, alors que les rumeurs les plus folles circulent : les enfants partent pour la Russie, ils vont être mutilés… C’est finalement Derna, une jeune célibataire qui va accueillir Amerigo, aidée par sa cousine Rosa et la famille de celle-ci.
J’ai lu avec beaucoup de plaisir ce récit très vivant et incarné qui nous est raconté du point de vue d’Amerigo, petit garçon très attachant, qui va vite se retrouver tiraillé entre sa mère et sa famille d’adoption. En effet, les petits Napolitains ne sont accueillis que durant quelques mois avant d’être renvoyés dans leur ville d’origine, dans une misère qui leur semble encore plus forte après avoir goûté le confort du Nord, sans avoir l’opportunité de continuer leur scolarité car il leur faut travailler, et auprès de parents qui, comme Antonietta, mènent des vies dures et compliquées, ne savent pas forcément bien exprimer leurs sentiments, et doivent parfois prendre des décisions pragmatiques quitte à faire de la peine à leurs enfants.
Je me sentais vraiment bien dans ce roman, et j’aurais d’ailleurs aimé qu’il soit plus long et plus développé : l’intrigue se déroule en 1946-1947, puis, après une longue ellipse, on retrouve Amerigo en 1994, ce qui m’a un peu laissée sur ma faim, d’autant plus que l’adulte qu’il est devenu se sent déconnecté de sa famille biologique tout en ressentant de la culpabilité. Je n’aurais pas boudé quelques centaines de pages supplémentaires, voire même plusieurs tomes, car le sujet était assez riche pour avoir le potentiel d’une grande fresque. J’aurais également voulu en savoir plus sur l’histoire vraie à l’origine du roman : combien d’enfants ont bénéficié de ce transfert vers le Nord? ont-ils été aussi bien accueillis que ce que décrit ce livre? quelle a été leur destinée? ont-ils été aussi perturbés qu’Amerigo a pu l’être?
Un beau roman trop court à mon goût, mais un sujet fort et une jolie plume.
Publié en Janvier 2021 chez Albin Michel, traduit par Laura Brignon, 304 pages.
4e lecture de la Rentrée Littéraire de Janvier 2021.
Etonnante histoire ! Pourquoi déraciner ainsi des enfants pour les renvoyer chez eux, je ne comprends pas bien quelle était l’idée…
Quoi qu’il en soit, c’est le genre de projet qui produit inévitablement des ravages… Si je le trouve à la bibli, je l’emprunterai volontiers.
c’était une sorte de parrainage, les faire partir en famille d’accueil quelques mois pour qu’ils aient une vie un peu plus confortable et « soulager » les parents …
Un autre point de vue https://giorinaldi.com/2023/03/29/le-trein-des-enfants/