« Bénie soit Sixtine » qui a grandi à Nantes, dans un milieu catholique intégriste : ses parents et son entourage ne reconnaissent pas Vatican 2, considèrent Jean-Paul II comme l’antéchrist, et sur l’échiquier politique se placent résolument à l’extrême-droite. Aussi brillantes soient-elles, les femmes interrompent leurs études ou renoncent à embrasser une carrière professionnelle pour se marier et mettre au monde (dans la douleur) de nombreux enfants, quand elles n’entrent pas dans les ordres. Il en va de même pour Sixtine qui se marie avec un excellent parti, Pierre-Louis Sue de la Garde, issu d’une famille de huit enfants. Elle tombe enceinte rapidement après la noce mais un drame va venir bouleverser sa vie…
La description du milieu dans lequel évolue Sixtine pourrait sembler cliché, mais vivant à Versailles, je ne doute pas que je croise régulièrement des personnes qui partagent les convictions religieuses et politiques de son entourage. Sixtine est pieuse, tranquille, un peu naïve, elle n’aime pas faire de vagues, et elle ne recherche pas particulièrement à s’émanciper. Ce sont deux événements, l’un tragique, l’autre heureux, qui vont faire appel d’air, et c’est en priorité pour protéger son bébé, à qui elle veut prodiguer soins et affection, que la jeune femme va s’éloigner d’un chemin tout tracé.
J’ai trouvé ce livre très beau et lumineux, je me suis attachée à cette jeune femme qui conserve sa foi mais souhaite la vivre autrement, dans l’ouverture, l’aide et le partage. Je ne serais peut-être pas aussi positive sans le talent de Maylis Adhémar, qui signe ici son premier roman – en effet, certains événements m’ont semblé arriver un peu facilement, et j’ai trouvé parfois que l’autrice forçait le trait – le fossé entre la vie de Sixtine et la jeunesse de sa mère, Muriel (racontée dans des lettres écrites par Erica, la grand-mère maternelle de Sixtine) est très grand, et peut-être même plus qu’on ne le pense, tout comme celui entre Sixtine et les jeunes gens marginaux qu’elle rencontre. Mais tout est finalement question de choix de vie, dans un sens comme dans l’autre, alors pourquoi pas.
J’ai donc adhéré à ce que proposait l’autrice, cela a fonctionné pour moi, car j’ai été happée par cette histoire émouvante, et par ce beau portrait de femme qui se libère des injonctions et des carcans pour mener une vie avec laquelle elle se sent en accord. Un livre sur un sujet peu traité en littérature, à découvrir.
Publié en Août 2020 chez Julliard, en poche chez Pocket, 304 pages.
Aïe! Je l’ai lâché au bout d ‘une cinquantaine de pages et pourtant les échos à la sortie me l’avaient fait noter. Le trait me semblait forcé, j’avais envie de secouer l’héroïne. Il faudrait donc peut-être que je le reprenne un de ces jours?
oui, ça fait très cliché, mais comme le dit Electra en commentaire, ce genre de personnes existe vraiment, et la description est sans doute assez réaliste !
oh très amusant, j’ai longtemps habité dans un quartier à Nantes où se trouve une maison qui est en fait une église avec les mêmes intégristes – ils se sont arrêtés à Pie XII (et la messe en latin) et rejettent le Vatican et les Papes contemporains. Ils sont intégristes. Ils venaient tous se garer devant chez moi, famille de 8 à dix enfants, tous habillés pareil, même voiture (espace) avec la flamme du FN collée à l’arrière .. A force de les croiser, j’ai remarqué que beaucoup (ils sont tous blonds, les enfants se mélangent, c’est impressionnant) n’avaient pas d’argent, et les enfants se refilent leurs vêtements, résultats les plus petits ont des vêtements usés, et beaucoup des chaussures très abîmées .. J’aimais moins les pubs anti avortement dans ma boîte aux lettres ou alors le 15 août où ils ont utilisé des hauts parleurs pour lancer leur messe en latin et ont réveillé tout le quartier.. du coup, je pense que l’auteure s’est appuyée sur du vécu ! Je suis curieuse donc de le lire
décidément, tu as de sacrés voisins ! 😀
Maylis Adhémar s’est inspirée de son milieu familial, mais à la différence de Sixtine, elle a grandi à la campagne, ses parents étant très attirés par la nature.
J’avais beaucoup aimé cette lecture même si j’ai trouvé le rapprochement entre Sixtine et le groupe de jeunes marginaux assez peu crédible…
oui, ça fait partie des quelques éléments de l’intrigue qui ne sont pas totalement crédibles, mais ça passe.