Cette année, je suis jurée du Prix des Lecteurs du Livre de Poche, catégorie Polar, et j’ai été ravie de la sélection de Février puisqu’elle inclut deux romans que j’avais envie de lire depuis leur sortie : « La Loi des Hommes » de Wendall Utroi et « Entre Fauves » de Colin Niel.
Jacques, cantonnier dans une petite ville du Nord de la France, trouve en ouvrant un tombeau arrivé en fin de concession un manuscrit en anglais. Avec l’aide de sa fille, il découvre que ce sont les mémoires d’un inspecteur de Scotland Yard qui exerçait à Londres à la fin du XIXe siècle. J. Wallace Hardwell est averti qu’un scandale risque d’entacher la famille royale, mais sans savoir ce qu’est exactement ce scandale. Dans le cadre de son enquête, il se retrouve à interroger trois personnes : Rebecca Brianey, qui tient une maison close et son fils adoptif Timothy, ainsi que Myrtle River, qui est une recruteuse de prostituées…
« La Loi des Hommes » est un livre assez particulier. Ce n’est pas un roman policier à proprement parlé, puisque ni l’inspecteur ni le lecteur ne savent ce qu’est l’objet de l’enquête. C’est plutôt un roman noir qui nous plonge dans les bas-fonds londoniens, où les enfants sont recrutés (voire élevés!) pour devenir les victimes de prédateurs sexuels, où les femmes, elles aussi victimes de la violence des hommes et de la misère, font tourner les rouages de ce système, par appât du gain et désir de s’élever dans la société, et où les puissants, malgré les crimes qu’ils peuvent commettre, bénéficient de tolérance voire d’impunité.
Le récit est haletant, je l’ai dévoré, et les personnages, que ce soit l’inspecteur ou ceux qu’il interroge, sont particulièrement incarnés, tout comme l’atmosphère du roman, servie par des descriptions très réussies . Malgré le sujet particulièrement dur, j’ai lu ce livre avec beaucoup de plaisir. Mon seul bémol serait la construction de l’intrigue : en effet, même si je comprends parfaitement l’objectif de l’auteur – montrer que malheureusement, même aujourd’hui, la Loi protège mal les enfants des prédateurs sexuels – les parties contemporaines autour de Jacques le cantonnier n’apportent pas grand chose au livre, qui aurait sans doute été plus fort si le lecteur avait plongé directement dans l’époque victorienne.
Néanmoins, ce roman reste une excellente surprise. Je n’avais encore jamais lu de livre de Wendall Utroi, et c’est un auteur dont je vais continuer à explorer l’œuvre.
Publié en 2020 chez Slatkine, 397 pages, en poche au Livre de Poche.
son nom m’est familier mais jamais lu non plus
un sujet très sordide !
ah c’est sûr !