« Vie Animale » est le premier roman de Justin Torres, d’inspiration autobiographique. Il est composé d’une quinzaine de fragments qui racontent l’enfance du narrateur et de ses deux frères, tous trois très proches en âge et ayant grandi dans une famille dysfonctionnelle.
Les parents les ont eus alors qu’eux-mêmes étaient adolescents : le père est d’origine portoricaine, lunatique et souvent violent, la mère semble complètement perdue. Tous deux ont un comportement erratique, et les trois enfants les observent, avec leur imaginaire, sans forcément comprendre tout ce qui se déroule devant leurs yeux. Justin et ses frères sont très souvent ensemble, à jouer à des jeux qui leur sont propres, une portée qui deviendra meute en grandissant.
Il y a quelques moments de gaité, de lumière, dans ce texte souvent sombre et vaguement inquiétant, où l’on sent que n’importe quelle situation peut facilement déraper vers le sordide. Il règne en permanence un climat de menace sourde, même lors de certains épisodes finalement plutôt heureux, comme une balade père-fils vers les chutes du Niagara. Pourtant les garçons sont soudés, assez joyeux, leur union fait leur force, c’est une fusion/enfermement, un refuge contre l’adversité, qu’elle soit intérieure ou extérieure puisque le monde n’est pas tendre envers ces enfants pauvres et métis.
Il y a une rupture dans ce récit initiatique coup de poing – d’ailleurs, si j’ai un bémol concernant ce texte, c’est qu’il m’a peut-être manqué une transition explorant plus en profondeur leur adolescence. On retrouve les trois frères après un petit saut dans le temps – la conclusion, surprenante, semble se dérouler alors que Justin est lycéen…une fin terrible mais émancipatrice, sans doute le début d’une nouvelle ère pour le narrateur phénix…
Un texte fort et marquant!
Publié chez L’Olivier en 2012, traduit par Laetitia Devaux, 144 pages.