En 2017, j’avais beaucoup aimé « Et soudain, la liberté », écrit à quatre mains par Caroline Laurent et Evelyne Pisier. En effet, Caroline Laurent qui était l’éditrice d’Evelyne Pisier, avait repris le projet, lorsque celle-ci était décédée lors de la rédaction du livre. Mais c’était aussi le récit d’un véritable coup de foudre amical entre les deux femmes.
Seulement voilà, le 4 Janvier 2021, le monde de Caroline Laurent s’effondre. Avec la publication de « La Familia Grande » de Camille Kushner, elle découvre (comme la France entière) qu’Olivier Duhamel, le mari d’Evelyne Pisier, avec qui elle avait également noué des liens amicaux, a abusé du fils de cette dernière, qu’elle était au courant, et qu’elle n’a jamais rien dit. « Sans le savoir, j’avais été l’amie d’un homme incestueux, et l’amie d’une femme qui n’avait pas dénoncé cet inceste. Pire, j’avais été la plume de cette femme-là ».
Avec la découverte de cet inceste, mais aussi de ce qu’elle vit comme une trahison de la part de celle qui était également son mentor, son modèle, et qui questionne le cœur de leur amitié, Caroline Laurent remet tout en question : le rapport aux livres, à l’écriture, aux hommes, à l’amitié, à la famille. Cet événement la ramène d’ailleurs au drame du décès de son père alors qu’elle était adolescente, et à une histoire familiale marquée par la mort, le secret et la solitude.
Le chaos intime va provoquer une mue, un désir de renaissance : la fin d’une relation amoureuse de quatorze ans, une consolation trouvée dans la littérature (de nombreuses autrices sont citées, d’Annie Ernaux à Anne Dufourmantelle, en passant par Déborah Levy ou encore Delphine Horvilleur) mais aussi dans l’introspection avec ce voyage solitaire dans les îles Féroé.
« Tout peut être détruit, tout peut être sauvé » : « Ce que nous désirons le plus » est un récit triste mais beau, l’histoire d’un bouleversement qui met fin à un cycle, mais permet également d’en commencer un nouveau.
Publié en Août 2022 aux Escales, 216 pages.