Odette Froyard était la grand-mère d’Isabelle Monnin, née en 1917, sympathique mais discrète, toujours vêtue d’une blouse à fleurs, à s’affairer à la cuisine. Une dame qui était plus dans le « faire » que dans l’ « être », qui semblait plus exister en tant qu’épouse, mère ou grand-mère, qu’en tant que femme.
Une dame sans histoire, dans tous les sens du terme. Sans histoire vraiment ?
Isabelle Monnin décide de redonner vie et incarnation à sa grand-mère décédée il y a trente ans, alors qu’elle-même n’avait qu’une vingtaine d’années. Elle interroge celles et ceux qui l’ont connue, tente de retracer son passé, sa généalogie… jusqu’au jour où elle découvre un fait inconnu et pourtant important : Odette n’a pas vécu toute sa vie en province, comme elle le croyait – à la suite d’un décès et d’un déclassement social, elle a passé plusieurs années à Paris, dans un orphelinat, lorsqu’elle était jeune fille, en compagnie de plusieurs membres de sa fratrie. L’histoire d’Odette aurait-elle croisée la grande Histoire ?
Isabelle Monnin, qui avait déjà donné libre cours à son imagination dans « Les gens dans l’enveloppe », va alors, en s’appuyant sur des faits réels, imaginer tout un pan de la vie d’Odette.
J’ai été touchée par la démarche de l’autrice qui s’intéresse à un genre de femme qui a été invisibilisée (ou s’est invisibilisée) – petite souris efficace, toujours au service des autres, laissant au mari la forte personnalité, les opinions, la carrière professionnelle et le statut social.
J’ai trouvé d’ailleurs que le livre mettait du temps à décoller et j’ai été bien plus ferrée par l’enquête, les rencontres que l’autrice va faire et par ce passé qu’elle imagine à sa grand-mère, sans doute parce que ce sont des éléments qui me passionnent – investigations, seconde guerre mondiale, imaginer une vie aux gens …
Si le début m’a fait un peu peur, j’ai finalement été charmée par le travail d’Isabelle Monnin et convaincue par la place qu’elle redonne à sa grand-mère dans l’histoire.
Publié en Janvier 2024 chez Gallimard, 272 pages.