« Une Fille sans Histoire », premier roman de Constance Rivière, revient sur un drame récent : la tuerie du Bataclan le 13 Novembre 2015. Adèle, serveuse au chômage, vit dans le quartier de la salle de concert: après une nuit de peur, elle voit à la télévision des photos des victimes et reconnait Mattéo, un étudiant italien qui fréquentait le bar où elle travaillait. La jeune femme se rend alors à l’Ecole Militaire, où sont accueillies les familles, et s’y présente comme étant la petite amie de Mattéo, y compris devant ses parents, venus d’Italie….Adèle se charge des formalités administratives et prend une place de plus en plus importante dans l’association de victimes.
Constance Rivière nous livre un récit polyphonique : l’histoire d’Adèle nous est racontée à la troisième personne, mais Francesca, la mère de Mattéo, Saïd, impliqué dans le soutien aux victimes, ou encore Jacques, le patron du bar où travaillait Adèle, donnent leur point de vue à la première personne. Ce procédé littéraire n’aide pas forcément à entrer dans le roman, surtout quand tous les personnages n’ont pas la même force (si j’ai apprécié Francesca, j’ai trouvé que Saïd peinait à trouver sa place), mais il a pour mérite de souligner qu’Adèle n’est pas une personne construite, à l’identité et à la personnalité propres. Elle est fuyante et n’existe que via ce que les autres projettent sur elle.
Il est par conséquent difficile de s’attacher à un tel personnage, peu incarné puisqu’elle est comme un fantôme. L’auteure donne cependant des éléments de réponse pour expliquer le comportement d’Adèle, cette décision soudaine de se faire passer pour qui elle n’est pas, une victime collatérale de l’attentat, et il y a quelque chose de fascinant dans ce personnage qui saisit sa chance pour exister enfin.
« Une Fille sans Histoire » de Constance Rivière retranscrit bien l’ambiance dérangeante que créent cette jeune femme et cette situation. Il est toujours compliqué d’apprécier un roman qui repose sur un malaise et un personnage principal désincarné et peu attachant, et je ne peux donc pas dire que cette lecture ait été plaisante mais elle a le mérite d’être marquante et de faire réfléchir…
Publié en Août 2019 chez Stock, 144 pages.
11e lecture de la Rentrée Littéraire de Septembre 2019.
oh oui, la forme choisie m’aurait aussi dérangé surtout si le roman tourne autour d’elle (même sur la couverture). J’ai vu que plusieurs personnes ont prétendu être au Bataclan, ont même touché de l’argent du fonds d’indemnisation des victimes avant d’être dénoncés et condamnés. Pourquoi ont-ils fait cela ? leur démarche m’interroge et je pensais que ce roman allait apporter une explication mais je sens que tu es restée sur ta faim…
là c’est un peu différent, elle ne se fait pas passer pour une victime, mais pour la petite amie d’une victime…(et c’était quelqu’un qu’elle connaissait de vue) ; pour ceux qui ont prétendu être au Bataclan : escrocs qui voulaient toucher de l’argent?, personnes ayant besoin d’exister? , personnes qui sont en souffrance et veulent se sentir reconnues en tant que victimes?