J’aime beaucoup lire des récits autobiographiques qui racontent des trajectoires assez exceptionnelles, où les auteurs ont déjoué les statistiques – qu’ils aient grandi dans une secte religieuse (Shulem Deen dans Celui qui va vers elle ne revient pas) ou encore dans une famille survivaliste (Tara Westover dans Une Education). « Basse Naissance » a donc retenu toute mon attention, car Kerry Hudson, aujourd’hui une journaliste et autrice reconnue, a grandi dans une grande précarité en Ecosse.
La jeune femme est née en 1980 dans une famille dysfonctionnelle, où règnent notamment des problèmes d’alcool. Sa mère est âgée de seulement vingt ans, son père est américain, schizophrène et n’a que de rares contacts avec sa fille. Kerry va passer quelques temps en famille d’accueil puis être ballotée de ville en ville, de HLM en B&B, en fonction des déménagements intempestifs de sa mère, qui passe son temps à se séparer puis à se remettre avec le beau-père de Kerry et père de sa petite sœur. Kerry va donc avoir une jeunesse chaotique et connaître un certain nombre d’événements traumatisants avant ses dix-huit ans.
Je suis très admirative du parcours de Kerry Hudson, mais je dois avouer que je n’ai pas apprécié ce livre autant que je l’aurais voulu. En effet, lors du processus d’écriture, très douloureux pour elle, l’autrice a choisi de revenir sur les lieux de son enfance. Les chapitres concernant ses souvenirs sont donc entrecoupés de passages où elle retourne dans les différentes villes où elle a habité. Malheureusement, ces chapitres sont certainement très importants pour l’autrice, mais ils ont desservi à mes yeux le récit, car ces retours se limitent souvent à une description du quartier, de l’immeuble habité et quelques conversations banales avec des riverains, sans qu’il y ait une vraie valeur ajoutée pour le livre.
Kerry Hudson a également souhaité, en sus de ses souvenirs, engager une réflexion sur la pauvreté au Royaume-Uni, la réduction des moyens financiers, des ressources, des initiatives pour sortir durablement les familles de leur situation précaire, et l’impact de cette situation sur les enfants, qui se retrouvent dépourvus de conditions optimales pour avoir de réelles chances de se construire un avenir. Cependant j’ai trouvé que l’autrice n’arrivait pas à trouver un équilibre satisfaisant entre récit autobiographique et essai. Si deux passages sont très intéressants (lorsque l’autrice retourne dans une école qu’elle a fréquentée, et lorsqu’elle se rend dans une banque alimentaire), il y a finalement peu d’analyse et de recommandations de sa part – même sur sa propre enfance : qu’aurait-elle préconisé pour qu’elle se déroule dans de meilleures conditions? D’ailleurs, ce qui m’a vraiment rendue triste pendant ma lecture, c’est que l’enfance difficile de Kerry semble parfois moins due à la précarité qu’au comportement de sa mère qui n’a pas l’air de vouloir ce qu’il y a de mieux pour ses filles. J’ai regretté également que le livre s’arrête quand Kerry part à l’université : on ne sait donc pas comment la jeune femme s’est débrouillée à Londres, sans soutien, sans argent, pour en arriver à sa situation actuelle brillante.
Une trajectoire admirable mais un livre qui m’a laissée sur ma faim…
Publié en Janvier 2020 chez Philippe Rey, traduit par Florence Lévy-Paoloni, 288 pages.
comme toi, j’aime ce genre de récits mais j’avais pas du tout aimé et donc abandonné son roman du coup j’ai préféré éviter celui-ci et finalement je ne regrette pas
ah on m’a conseillé son roman, mais je ne pense pas que je vais accrocher, alors 😀
J avais bien aimé cette autobiographie l écrivaine s est mis à nue pour écrire sur la précarité son écriture à sûrement été douloureuse habitée par les ogres du passé
ah oui on sent que c’est douloureux et très intime…